• Pierre Bismuth

    Following the Right hand of Sigmund Freud (vidéo)

    Capture d'écran

    Courtesy Jan Mot, Brussels

    Fiac 2009

    Crédit photo Anthropia

     

     

    Lundi

    Pondu cinq mini-rapports, l’impression d’être une pisse-lignes, l’art de la synthèse en 15 pages, appris dans ma jeunesse, quand je composais des chansons, trois minutes pour dire une histoire, une époque, un sentiment. Maintenant, je mets ça au service des actions d’entreprise. Dans audit, il y a écoute. Encore de la musique de phrases d’humains entendues, régurgitées en idées, enjeux et problématiques. Quel drôle de métier que penser l’entreprise.

     

    Mardi

    Mort de Lévi-Strauss. Mes études me sautent à la figure. Structures élémentaires de la parenté, linguistique et anthropologie, anthropologie du proche, anthropologie du travail. Qu’est-ce qui se rejoue des rites et mythes familiaux dans le rapport à un métier, à une entreprise ? Souvenir d’une époque où j’ai craint de devenir chercheur en anthropologie, ce flirt avec la bordure de société, quand on tente de penser le tout, alors qu’on est soi-même dedans, comme si cette société nous était extérieure. Vertige de l’à-pic. Exit la recherche.

     

    Admiration pour Lévi-Strauss qui a tenu cette ligne de crête, sans vertige apparent. Sans doute parce qu’il s’est appuyé sur la grande famille des ethnologues, la réalité des monographies servant de repère.

     

    Intéressée par l’organisation de ses obsèques. A échappé au tra-la-la. Il est mort en homme ordinaire, façon de nous dire qu’il en était un, tout simplement. Pas de rites de notoriété. Juste les rites ordinaires de l’inhumation. N’a fait le jeu ni des médias, ni de Sarkozy. Bien joué.

     

    Mercredi ou jeudi, je ne sais plus

    Entendu chez Taddéi cette phrase d’Eric Besson en fin d’émission. Il faut « vous souvenir que c’est, en France, l’Etat, qui a créé la nation et que c’est pour ça que nous avons une identité nationale plus forte que d’autres ». Je me tâte, raccourci historique un peu truqué, non ? Mes cours de sciences politiques, vite. L’impression que cette vision date de la IIIème République. Souvenir d’une vieille amie du Sud-Ouest, qui me racontait qu’enfant, on lui tapait sur le bout des doigts avec une règle, quand, à la récré, elle parlait basque. L’Etat qui forge la nation, qui la force à parler français, à considérer les Gaulois comme ses ancêtres. Mater le peuple, les immigrés, les passer par le lit procustéen de sa vision de l’identité nationale, quel programme !

     

    Samedi

    Capté chez Finkie quelques bribes sur Lucrèce. Un travail intéressant d’Elisabeth de Fontenay, réhabilitant l’âme, sous sa forme laïque, correspondant à l’être vivant et disparaissant à la mort du sujet.  

     

    J’avais toujours cru que l’étymologie de religion venait de religare, relier, se relier aux autres, me disais que cela ne correspondait pas à mon expérience des religions. Entendu que c’était l’étymologie voulue par les chrétiens. Qu’une autre se cache derrière, religere, recueillir les rites des anciens. Impossible de retrouver mon Gaffiot pour vérifier. Je préfère cette dernière étymologie. Les religions sont toutes tournées vers la généalogie, la dimension diachronique. C’est pour ça qu’elles dérapent dans nos siècles de l’horizontalité !

     

     


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  • Crédit photo Anthropia

     

     

    Samedi

    Arrivée crépusculaire au Golf. Superbe cadre. Champagne à gogo, repas, jeux, dancing jusqu’au petit jour. Je n’aime pas les mariages, mais celui-là oui.

     

    La photo du pied du marié sur le verre, je l’ai eue. Le photographe officiel a demandé à ce qu’on la refasse. C’est de la triche.

     

    Lundi

    Je prépare mon planning de rentrée. Première demi-journée et déjà l’impression de ne plus avoir de temps, c'est-à-dire plus de vie. Nietzsche disait qu’on est esclave, si on ne dispose pas des deux tiers de son temps. Deux tiers de vingt quatre heures de la vie d’une femme font seize heures. Ah, mais Nietzsche comptait-il hors les heures de nuit ? Parce que sinon, il faut compter sur base dix-sept heures.

     

    Ai-je dix heures de liberté par jour en plus de mes nuits ?

     

    Mardi

    Réunion de rentrée avec l’équipe. Des retards, des bouchons, j’attends trois-quarts d’heures que tout le monde soit là. La lutte pour le temps a commencé. La journée fuit, bien vite on est le soir, on dîne tous ensemble. Qu’est-ce qu’il disait Ivan Illich, travailler deux heures par jour ?

     

    Mercredi

    Arrivée matinale dans un golf. Séminaire d’été d’entreprise. Bonne pioche, l’équipe est sympa. A vingt deux heures, l’équipe est toujours sympa, heureusement. Par la fenêtre, toute la journée, je vois des golfeurs de tous âges ; ils les ont, eux, les dix heures.

     

    Jeudi

    Suite du séminaire. Toujours bonne pioche. J’enchaîne les onze heures d’affilée. Presque pas le temps de souffler. Vu une chenille à l’entrée du restaurant, pris une photo. Vu trois golfeuses découpées sur fond de vallée, pris une photo.  Photographier/Ecrire, c’est ça ma liberté. 

     

     

     


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  • Diane Arbus

                           








    Ah l'étrange plaisir d'un bel Alexandrin











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  • Nicole Kidmann

    Film doublé

    Crédit photo Anthropia

     

     

    Je pense à elle, qui elle était.

    Sauf que c'est de moi dont il s'agit,

    qu'est-ce qui restera de moi après ?

    Question parano s'il en fût.

    Façon je maitrise l'image que les autres auront de moi plus tard,

    une question de vie éternelle, l'image qu'on laisse.

    Vous la posez-vous parfois ?

    Juste pour voir si l'image que ça renvoie

    fait évoluer votre quotidien ?

     

    Mais la façon dont on meurt affecte le cliché final,

    et ça on ne le maitrise pas.

     

    Toute cette métaphysique de bazar,

    parce qu'en observant cette photo prise sur le vif durant un film,

    j'ai compris pourquoi je l'avais prise,

    pour le sous-titrage : "qui elle était",

    un paradoxe face à cette femme pleine de vie.

     

    Le paradoxe d'une narration qui s'applatit,

    qui suis-je ? c'est réflexif, ça ouvre, une quête,

    qui elle était, sans point d'interrogation,

    c'est juste plat, introduisant un discours à l'imparfaite réalité.

    C'est nous quoi, quand on se retourne.

     

     


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  • Fiac 2007

    Si vous connaissez le nom de l'artiste, merci de me le signaler.

    Crédit photo Anthropia

     

    Oui je sais que finir la semaine un mercredi,

    c'est de l'abus,

    mais ça déborde.

     

    Jeudi

    Ai suivi un cycle de production,

    je veux dire tout ce qui se passe

    de la vente de service à la réalisation de la prestation,

    c'était dans une grosse structure de service à la personne,

    je fais un audit, tout ce qui dysfonctionne.

    Phase d'observation : je suis une salariée à domicile, auxiliaire de vie sociale,

    chez un homme handicapé, Claude,

    souffrant de maladie orpheline, on n'en sait pas davantage,

    quand j'arrive, il est assis sur une chaise, l'accoudoir rentré dans son flanc,

    le corps penché, il ne peut se tenir droit à cause de sa scoliose.

    Cela fait un an qu'il passe ses journées dans sa chaise, le corps tordu.

    il n'a pas les moyens de s'acheter

    un fauteuil turbo réacteur freins ABS, moteur à 13 soupapes, roulant,

    la Maison du handicap du Conseil Général ne le lui finance pas,

    alors on lui offre des séances de kiné, de massage,

    pour défaire ce que la position torve provoque.

    Le pire, c'est qu'aider une personne dans ces conditions,

    devient de la complicité de maltraitance avec les institutions.

    Dont acte.

     

    Vendredi

    Je poursuis mon audit, auprès d'une responsable.

    Elle me parle des salariées qui ont des soucis de vie.

    Justine a ses deux enfants placés par l'ASE,

    le père alcoolique battait les petits,

    vient d'apprendre qu'ils ont été victimes

    d'attouchements dans la famille d'accueil.

    Elle tourneboule, crie, pleure, lâche le boulot.

    Elle qui tentait de recréer les conditions pour accueillir ses petits.

    Rage.

     

    Lundi

    On installe un ascenseur dans l'immeuble,

    bruits d'enfer, odeur de brûlé,

    ils percent un puit dans la cage d'escalier,

    une sorte d'autoroute verticale,

    tout doit céder sur son passage,

    les marches d'escalier, le plâtre, le stuc, la rampe,

    peu à peu s'érige une structure métallique,

    les itinéraires des insectes et des bactéries

    sont modifiés, il faudrait respecter l'éco-système,

    créer des passerelles,

    mais la société ascensoriste n'est pas durable,

    elle tranche dans le vif.

    Ceux qui résisteront au tsunami prendront l'ascenseur.

     

    Mardi

    Marre de marre. On paie son train aussi cher qu'un billet d'avion,

    mais on gèle sur les quais, un TGV sur 4 a du retard,

    l'ambiance sonore est épouvantable,

    qui a dit que le train c'est écolo ?

     

     

     

     

     

     


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