• Je hais le comparatisme

    A. Balasubramaniam

    Gravity

    Galerie Kalwar India

    Art Basel 2008

    Cliché Anthropia

     

     

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    Je hais le comparatisme, car il tire vers le bas.

    <o:p> </o:p>

    Dire qu'on est mondialisé et pour cela tirer les salaires vers le bas,

    c'est du comparatisme.

    <o:p> </o:p>

    Dire que parce qu'on a instauré la flat tax dans des pays européens,

    tous les pays européens devraient pratiquer le taux zéro d'imposition,

    c'est s'engager dans une course au pire.

    C'est encourager chaque pays à ne plus financer les services publics.

    <o:p> </o:p>

    Et c'est au nom du comparatisme,

    que le Parlement européen vient de voter la directive Retour.

    <o:p> </o:p>

    Instaurer pour règle qu'on peut mettre en centre de rétention

    (c'est-à-dire en prison)

    tout étranger sans papier jusqu'à 18 mois,

    avant de l'expulser,

    et se servir comme le font les communicateurs

    de l'inique argument que c'est un progrès,

    parce que par exemple,

    en Suède, hein,

    on peut pour l'instant y rester à vie en centre de rétention,

    montre la limite de se comparer sans cesse aux autres.

    <o:p> </o:p>

    En Suède, on reste en moyenne 17 jours en centre de rétention,

    ce qui est déjà 17 jours de trop,

    mais dans les conditions des prisons suédoises

    (avec le minimum de confort et même des salles de sport),

    c'est mille fois moins pénible

    que dans nos centres de rétention puants et inconfortables, un seul jour.

     

    Entrons dans le comparatisme

    et cela n'en finit plus.

    acceptons de commencer

    à discuter du seuil, de la moyenne,

    de la pratique versus la règle,

     rien n'est comparable à rien,

    il nous faut l'admettre.

     

    Entrons dans le comparatisme des détails

    de l'oreiller qu'on ajoutera,

    du guichet auquel on aura droit une fois par semaine,

    du berceau rembourré pour le bébé incarcéré,

    le diable étant dans les détails,

    on perdra notre âme.

    <o:p> </o:p>

    Oui, l'âme, oui, vous savez,

    ce truc intérieur, qu'on oublie trop souvent,

    tout ce qui n'est pas l'obsession du fric, du sexe, du confort

    ni le recours au raisonnement matérialiste, fin de la vie sociale.

    <o:p> </o:p>

    Terrible position des gestionnaires,

    on cherche le plus grand commun dénominateur,

    on prend le mieux-disant de chacun,

    on détermine le point commun de ces mieux-disant

    et cela devient la norme.

     

    En matière de sécurité,

    on prend les règles les moins abusives de chaque pays,

    on cherche la plus haute du panier,

    c'est-à-dire de fait la plus abusive 

    et on l'adopte comme base,

    qui peut le plus peut le moins,

    mais pourquoi faire moins quand on peut faire plus.

     

    Je suppose que la Suède a accepté,

    parce qu'en pratique,

    le temps de rétention

    ne dépassait pas 18 mois.

    Et oui, elle s'est calée sur le moins dérangeant

    en comparant ses chiffres.

    <o:p> </o:p>

    Le comparatisme a permis aux ingénieurs

    de chercher le meilleur gaz pour asphyxier les Juifs

    dans les camps d'extermination.

    A considérer les détails, on oublie l'objectif.

    A mesurer, on oublie le sens.

     

    Le comparatisme,

    c'est le calcul de la manière la moins cruelle

    d'exécuter un condamné à mort,

    abandonnons la guillotine,

    préférons la chaise électrique,

    abandonnons la chaise électrique,

    préférons la solution chimique.

     

    Le comparatisme est la gangrène contemporaine.

    <o:p> </o:p>

    Le comparatisme ambiant de notre époque,

    est-ce encore la médiation du désir,

    comme l'expliquait René Girard dans sa thèse,

    je désire un objet parce qu'un médiateur me l'inspire ?

     

    Je n'en suis pas sûre. Désormais,

    on ne désire plus selon l'autre, on rejette selon l'autre.

    On expulse, on emprisonne,

    tout cela en se comparant à l'autre qui en fait moins,

    qui a éliminé son problème par une solution extrême,

    on prend le pire chez l'autre et on l'adapte en mieux.

     

    Car l'Europe est bonne.

    Elle a le sens des droits de l'homme,

    Elle a choisi une solution

    moins grave que celle de la Suède,

    n'est-ce pas.

    Ou elle veut éviter qu'on fasse

    la politique yo-yo des Italiens ou des Espagnols,

    qui donnent des cartes de travail un jour

    et expulsent le lendemain.

    Inhumaine politique.

     

    Et c'est cela que vont nous dire les médias,

    que l'Europe est bonne pour l'étranger,

    qu'elle a tout fait pour éviter le pire.

    Mais a-t-elle pour autant

    donné le meilleur d'elle-même ?

     

    En mettant le curseur à cette hauteur,

    elle a créé une borne,

    qui finit par devenir la norme,

    pourquoi faire moins quand on peut faire plus ?

    <o:p> </o:p>

    Je hais le comparatisme,

    parce qu'il sert à tout justifier,

    et toujours vers le pire.

    <o:p> </o:p>

    (Lire la bouleversante chronique

    de Judith Bernard sur @si).

     

     

     

     

     

     

     

     


  • Commentaires

    1
    Jeudi 3 Juillet 2008 à 15:43
    Pensée
    Je n'ai pas peur de revendiquer du comparatisme. En fait, ce n'est même pas la peine. Le comparatisme est simplement un moment inévitable de la pensée tout court. Refuser le comparatisme, c'est refuser de penser. On voit bien d'ailleurs qu'il ne suffit pas de prendre un mot et d'y plaquer tout et n'importe quoi qu'on déteste pour avoir raison. Mais il est vrai que les artistes sont payés, TRES CHER, généralement par un sponsor très riche, pour dire ou faire n'importe quoi pour justifier l'ordre établi (aujourd'hui comme par le passé - je ne parle pas de l'art moderne seulement) et s'assurer qu'on ne pense pas.
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    2
    Anthropia Profil de Anthropia
    Samedi 5 Juillet 2008 à 10:25
    Comparatisme de l'action
    Comparatisme, oui certes, on en fait tout le temps. Mais dès lors qu'il sert à justifier les bêtises, àempêcher de penser par soi-même, il est néfaste. C'est cela que je dénonçais.
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