• Le Hammam -(L'intégrale)

     
    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>Acte I
     


    <o:p></o:p>
    (Dans une salle de repos, une fille écrit. Un homme la regarde. Elle relève la tête. Il lui sourit discrètement).




    <o:p></o:p>
    Vous écrivez votre journal ?




    <o:p></o:p>
    Non, je cherche à écrire une seule phrase qui ait du sens.




    <o:p></o:p>
    Vous voulez parler d'un dialogue : qu'il ait du sens, pour moi par exemple ?




    <o:p></o:p>
    Non, je veux parler d'écriture. Je voudrais parler du lien délivrant. Je voudrais raconter la dépendance, qui n'en finit pas. La fusion. Peau d'Ane, sans lien ni rien.




    <o:p></o:p>
    Peau d'Ane, le conte. Ah, oui, l'inceste ?




    <o:p></o:p>
    Peau d'Ane n'est pas une histoire d'inceste. Il y est question de l'individuation.




    <o:p></o:p>
    Individuation ?




    <o:p></o:p>
    Oui, elle cherche la question, qui ne trouvera pas de réponse chez l'autre. Sa question à elle, celle qui la fait absolument originale. Elle ne veut pas entrer en fusion avec cet homme, son père.




    <o:p></o:p>
    Mais ce père veut l'épouser. Elle lui oppose des obstacles et il a réponse à tout.




    <o:p></o:p>
    Vous remarquez la progression. La robe couleur du ciel, du temps, du soleil. Elle lui demande l'inimitable. Mais lui, rien ne le rebute. A ciel, il suit.  Pour soleil, c'est déjà plus difficile, mais il ne passe pas. Même pour le temps, il trouve toujours une solution. Il a tous les atouts dans son jeu. Elle le met en demeure d'oser créer l'irreprésentable, la confusion des générations. Et lui ne renonce devant rien. Comment pourrait-elle alors contester la splendeur du travail fourni ?




    <o:p></o:p>
    Mais pour l'âne, hein, pour l'âne. Il ne s'agit pas de représentation ? Pourquoi demande-t-elle la fourrure de l'animal ?




    <o:p></o:p>
    Elle lui demande l'impossible. Vous comprenez, quelque chose qui l'arrêtera. Elle lui demande de choisir entre le pouvoir, les fastes et elle. En espérant que cela fasse frontière entre elle et lui. La seule chose qu'il ne devrait pas pouvoir lui donner. Elle veut dire « stop » à l'anéantissement par le don. Faire cesser cette ronde infernale des cadeaux qui l'écrasent.




    <o:p></o:p>
    En tout cas, cela ne marche pas.




    <o:p></o:p>
    Lui est dans une telle confusion, que rien ne l'arrête. Elle voit bien qu'elle n'y arrivera pas. Elle décide de fuir.




    <o:p></o:p>
    Comme vous ?

     _______________________________________________________________

    Acte II



    (Elle est allongée et fume une cigarette. Il la contemple.)

    Qu'avez-vous fui ?

    J'ai fui la Confrérie du Globe.

    La Confrérie du Globe ? C'est une secte ?

    Non, c'est une famille. Enfin oui.

    Pourquoi l'appelez-vous ainsi ?

    La Confrérie du Globe, c'est un espace clos, sans hiérarchie. On y est tous frères et sœurs.

    Pourquoi ce nom grandiloquent. Confrérie du Globe.

    Parce que c'est puissant. Vous êtes dans une sphère, une enveloppe. Vous êtes claquemurée. Mais c'est à votre insu. Vous ne vous doutez de rien. Cela n'a ni forme, c'est incolore, inodore. C'est mou aussi. Vous pouvez tenter d'avancer, d'en échapper. L'enveloppe se déforme, s'allonge, vous donne l'impression que la route est ouverte. Mais soudain, l'angoisse vous assaillit. Le doute vous prend. Alors, vous rebroussez chemin. Quand on rebrousse chemin, on croit agir de son plein gré. Et bien, cette enveloppe-là agit sur moi pour me décider à rentrer au bercail, comme si j'étais libre. 

    Ce n'est pas réel ? De quelle nature est cette enveloppe ?

    C'est une gangue. Elle emprunte ma forme et celle des autres enveloppés et nous enferme à l'intérieur du Globe.
     
    Que voulez-vous dire ? Emprunter votre forme ? l'intérieur du Globe. (Il pousse un soupir de découragement).

    Imaginez une enveloppe qui soit autour de vous, en vous, au milieu de vous, qui vous parcourt de bout en bout, enfermée comme dans une bulle de savon, qui ne cède pas à l'air. Vous croyez être un, indivisible quoi. Et vous êtes en fait fondu dans le tout. Un tout que vous ne sentez pas, inoxydable, inattaquable, insubmersible, incassable, mais insensible. Vous ne pouvez que l'approcher par déduction. En fait, c'est un milieu. Et comment peut-on savoir qu'on vit dans un milieu, quand on n'a jamais connu que cela. C'est autour et c'est dedans. En vous.

    Vous êtes un peu mystique, ésotérique ? Ah, non, je sais « new age » ! Ce n'est pas ces histoires de cosmos. Non ?

    (Elle reprend ses esprits, sourit timidement). Excusez-moi. C'est la première fois que vous venez ici ?

    Oui, j'avoue que je ne me doutais pas de ce qui se trouvait derrière la façade.

    C'est la première fois que vous venez ? Vous n'êtes pas un familier du hammam ?

    Non, dans ma famille, mes arrière-grand-pères allaient aux bains-douches. Mes parents se lavaient dans la cuve de cuivre à la cuisine, un broc d'eau chaude dans une main, un broc d'eau froide dans l'autre main. Moi je suis né à l'ère de la salle de bain. On l'a fait construire quand j'étais enfant. Mon premier bain a été un vrai bonheur.

    Oui, c'est bon, un bain. Et vous aimez ici ?

    C'est un peu insolite. J'aime les mosaïques, le bleu. Les fresques sur les banquettes. Oui, je crois que j'aime bien. (hésitant). Le hammam, c'est un peu comme votre enveloppe. La vapeur d'eau vous entoure, vous pénètre.

    Oui, mais l'eau n'empêche pas de sortir.

    Vous en êtes sorti de la Confrérie du Globe ?

    Le Globe est toujours là, dans ma tête, dans mon corps. Je crois être sortie et je le débusque tel un fantôme, toujours bien présent. J'ai un pied au-dehors. Mais je suis souvent tentée de me lover dans l'enveloppe. Cela protège de l'extérieur.

    Votre histoire d'enveloppe, cela fait penser à un bébé. L'utérus. Le fœtus s'y trouve, comme dans un gangue. Puis la poche de placenta rompt, la mère perd les eaux, le bébé naît. Il y a là un cycle, qui conduit à sortir inéluctablement au bout de 9 mois. N'est-ce pas le fantasme de votre naissance que vous revivez ?
    (agacée) Le fantasme de la naissance ? Cela vous rassure de mettre votre propre métaphore sur mes histoires de globe, d'enveloppe. Alors, si vous voulez une image, pensez plutôt à la chenille processionnaire, cette immonde gangue, répugnante, cette chenille qui dévore tout sur son passage. Voilà, vous serez plus prêt de ce que je ressens.
    (penaud) Excusez-moi. Je ne suis pas très versé dans la psychologie. Je ne suis pas un habitué des conversations de femmes. (pour lui) Toute cette sensiblerie...

    (Il s'étale mollement en se frottant le ventre).

    Elle le regarde.

    Vous, c'est le contraire. Vous vous vautrez dans la réalité.

    Voilà les gros mots, maintenant. (Il se met sur le côté et lui sourit gentiment). Oh, je ne voulais pas vous heurter.

    (Il se met sur un coude).

    Vous dites que je me vautre dans la réalité, en fait j'y vis, je m'attache aux faits, à tout ce qui se voit, ce qui se touche. Mon esprit est un système neuronal, mes pensées des connexions. Voilà ce que je vois. Et pour l'imaginaire, je ne m'y attache pas, ce sont pour moi les scories de la pensée, l'entropie du système, un reste à jeter. Si je devais m'y arrêter, je n'aurais pas de temps pour vivre.

    (Satisfait de lui, il se remet sur le dos).
    <o:p> </o:p>
    (Elle sort de la salle).
    <o:p> </o:p>

    <o:p>_________________________________________________________________________________________</o:p>

    <o:p></o:p> 
    Acte III


    (Elle sort du hammam)

    J'peux vous offrir un thé ?
    (Zut, il est là, celui-là !)


    Oui, si vous voulez.
    Là ? (Il désigne en face du hammam un café égyptien, un grand narguilé d'or peint sur la vitrine, et des petits rideaux en brocard de Damas, rouge, marron et doré à fines rayures).


    Pourquoi pas ?
    (Pourquoi elle accepte ?)


    C'est quoi vot'moto ?
    Une routière, une allemande. Une BM. Vous voulez les caractéristiques techniques ?
    (Il a repris un ton narquois).


    Vous êtes désagréable. Pourquoi vous m'invitez ?
    Je n'avais pas l'intention de vous embêter tout à l'heure au hammam, je voulais vous aider.
    (Il lui tend son paquet de Benson et Hedges Platinum, tiens, les moins dosées, et lui allume une cigarette). 


    Merci.
    (Quand il lui a présenté la cigarette, elle a senti sa peau douce).
    (Il lui jette un regard. Elle hésite. De chasseur ?)


    Un thé à la menthe ?
    Oui.


    Deux thés à la menthe, s'il vous plaît. (Voilà, il est parfait, organisé, lui demande son avis, passe la commande, ça commence).
    (Il la regarde. Elle regarde son regard. S'il compte sur elle pour faire la conversation, il se trompe. Elle n'aime pas les chasseurs, ni les hommes qui prennent en charge les nanas).


    Mon père m'a toujours dit de rester autonome.
    Ca veut dire quoi ?


    Libre, quoi, indépendante.
    Ca comprend quoi au juste cette autonomie ? Le café, vous avez le droit de le prendre avec quelqu'un ? Ou bien c'est vous qui payez peut-être ?
    (Elle se sent prise à son propre piège).


    Oui... ça m'arrive de payer, pour ne pas me sentir redevable.
    Pour un thé à la menthe, vous sentez quoi, que vous devez passer à la casserole, pour un thé à la menthe ?
    (Il paraît un peu énervé)


    Passer à la casserole, vous voulez dire le sexe ?
    Je ne sais pas moi, vous me parlez d'indépendance. Il y a quand même des choses qu'il vaut mieux faire à deux, non ?


    Oui, bien sûr. Mais en général, cela ne me réussit pas beaucoup ce genre de truc.
    Truc, quel truc ?


    Le sexe. Les hommes croient toujours que nous les femmes, on veut une histoire, en fait non, on veut sentir une peau sur sa peau pendant quelques heures. Pour se réchauffer, se sentir moins seule.


    D'une, vous n'êtes pas toutes les femmes. J'en connais qui veulent bien d'une histoire. Et puis permettez-moi de vous dire que pour ce que je pense, j'en suis seul juge, non ?
    (Elle en a assez, elle se ridiculise, comment a-t-elle pu dire autant de bêtises en si peu de temps).


    Si je vous dis cela, c'est que je le vis régulièrement. Cela commence légèrement, puis cela se termine en pataquès.


    Ecoutez, je n'ai pas le goût du pataquès. Et rassurez-vous j'aime bien les femmes indépendantes.


    Autonome, plutôt. Mon père m'a dit un jour, tu dois être autonome. En fait, c'était un ordre. Donc soit je deviens autonome, me débrouille toute seule, mais comme je lui obéis, je ne suis pas autonome. Soit je m'attache à quelqu'un et alors je ne suis plus autonome, mais en fait je le suis, puisque je désobéis à mon père. Vous voyez, une injonction paradoxale, impossible à réaliser.
    (Coup d'œil effaré de lui. Elle s'enfonce).




    Je vais d'abord boire mon verre, vous voulez bien, puis vous m'expliquerez cela.


    <o:p></o:p>
     _____________________________________________________________________________________
     Acte IV
    <o:p> </o:p>
    Vous n'avez pas compris ? C'est pourtant simple. C'est ce qu'on appelle la double contrainte. Je ne peux pas choisir une solution, sans choisir l'autre en même temps. J'ai tort dans tous les cas. Bref, c'est l'impasse. Je suis dans une impasse.


    Dans mon métier, on apprend que les impasses, faut les dépasser. 

    Les dépasser ?


    Oui. Une impasse n'existe que parce qu'on se pense dedans.


    Mais je n'ai pas le choix. J'y suis dans l'impasse.


    C'est une question de regard. Si vous vous déplacez, si vous voyez les choses d'un autre point de vue, vous n'êtes plus dans l'impasse.


    Mais dans ce cas, je ne suis plus moi. Moi, c'est mon regard sur les choses, non ?


    Alors, disons que votre moi peut changer de point de vue.


    Ecoutez, vous me semblez un peu trop sûr de vous. Notre marge de manœuvre est quasi-nulle dans la vie. Changer de point de vue c'est le chemin de toute une vie. Cela ne se fait pas en deux secondes.


    Quand on est dans une impasse, on peut vouloir l'explorer en long en large, s'y complaire. Ou remonter en marche arrière, très vite et en sortir.


    Oh, je ne suis pas aussi maligne que vous, puisque moi ça fait longtemps que je suis dans la nasse.


    C'est le principe du nœud coulant, plus je bouge, plus ça serre.Vous connaissez l'histoire des deux petites mouches prises dans un pot de lait ?


    Euh, non.


    Deux petites mouches sont tombées dans un pot de lait. L'une se contente de nager. Elle coule épuisée au bout d'un moment. L'autre ne cesse de bouger de toutes ses forces, plus elle bouge, plus elle bat le lait qui finit par devenir du beurre. A la fin elle saute à l'extérieur, en s'appuyant sur la surface du beurre. C'est pour vous dire qu'il faut réagir et sortir de l'impasse.


    Mais c'est utopique. L'apologie du mouvement, de la lutte...


    Moi j'y crois, à la vie comme sport de combat.


    C'est un truc de mec.


    Vous savez quoi, vous êtes déprimante. Tiens, à votre santé.(Il trinque avec son verre de thé).
    (Elle se sent nulle, mais elle trinque).(Ce type l'énerve, parce qu'il n'a pas de problème, en tout cas, il a l'air d'avoir les réponses).
    (Il l'énerve surtout parce qu'il froisse sa vanité : elle aime bien ses pensées, elle les trouve intelligentes, lui, il s'en fout).


    Vous qui savez tant de choses, c'est quoi votre métier.


    Ingénieur, je suis ingénieur.


    Ah, vous faites dans la technique, ah je comprends mieux. 

    Qu'est-ce que vous comprenez ?

    Vous, les techniciens vous passez votre temps à corriger les défauts. La technique, ça n'est que ça. Un travail mécanique, corriger les défauts et réessayer jusqu'à ce que ça marche. 

    Ce n'est pas une si mauvaise définition, vous savez.


    Mais vous faites pareil avec moi. Depuis que je vous connais, c'est-à-dire exactement deux heures (elle regarde sa montre) et trente-deux minutes, vous passez votre temps à corriger mes défauts. Mais les vôtres, hein ? Les vôtres, vous ne les voyez pas.

    (Il se tait).

    Ben, je vais vous dire ce qu'est un technicien. (Il attend).

    Un obsessionnel, qui ne voit que les procédures, les étapes-clefs, l'enchaînement des actions. Un maniaque, qui passe son temps à tout border, mais qui ne voit pas l'essentiel arriver. Un jaune, un social-traître, qui trahit l'esprit pour la matière, l'idéologie pour l'efficacité. Tout cela au nom de la belle ouvrage.


    Mais pourquoi tant de haine, Madame ?(Il a dit cela sur un ton mi-sérieux, mi-ironique).

     


     ______________________________________________________________________________________

    Acte V


    (Elle est seule. Elle s'ennuie. Il entre).

    Ah vous êtes là.

    Vous aussi apparemment. 



    (Elle) Vous avez fait un gommage avec la grosse Nora ?



    <o:p></o:p>
    Non. J'avoue qu'elle m'impressionne un peu. Elle est très énergique non ?



    <o:p></o:p>
    Il le faut pour un gommage. Cela revigore.



    <o:p></o:p>
    Mmum. (Il étend sa serviette et s'allonge avec un soupir de bien-être).



    <o:p></o:p>
    Vous venez souvent, on dirait ?



    <o:p></o:p>
    De temps en temps. Je viens pour penser.



    <o:p></o:p>
    Penser. Ouais, j'avoue que moi, euh, j'ai pas trop le temps. Je vis à cent à l'heure.



    <o:p></o:p>
    Et qu'est-ce qui vous a donné l'envie de venir ici ?



    <o:p></o:p>
    C'est ma voisine. Elle va souvent au hammam. Hier, je suis rentré épuisé, le dos en marmelade. Je m'étais levé à 5 heures du matin, j'ai fait Paris-Marseille. Toute la journée en séminaire. Et le soir, comme tous les vendredis, le dernier Shuttle avait une heure de retard. A dix heures, elle m'a entendu gémir sur le paillasson. Elle a ouvert la porte, m'a invité chez elle, m'a préparé un bol de soupe. Et m'a dit : Toi, tu vas me faire le plaisir d'aller au hammam demain matin. Et me voilà.
    Votre voisine, hein ?

    Oui, ma voisine, Sandra, lesbienne et fière de l'être.



    (Décidément, il ne la rate jamais. Elle, se sentant de nouveau dans la bêtise objective). Vous allez mieux ?



    <o:p></o:p>
    Lui sa main sur le ventre en tapotant sa toute petite bedaine.



    <o:p></o:p>
    Cela va bien. Merci.



    <o:p></o:p>
    Elle, hésitante



    <o:p></o:p>
    Pour l'autre jour, euh, excusez-moi. Je n'aime pas qu'on me prenne pour une dingue.



    <o:p></o:p>
    J'ai repensé à votre truc. C'est pas faux. Cela m'a fait réfléchir. Finalement, vous n'êtes pas si dingue que cela. (Il sourit).


    (Elle respire plus légèrement. Mais c'est fou, il suffit qu'il dise un truc et elle se sent soit illégitime, soit rassurée. Elle fronce les sourcils).


    Voilà que votre visage s'assombrit à nouveau. Ne me dites pas que vous êtes de nouveau en colère. Je ne sais plus quoi vous dire moi. Je vous dis que nous n'êtes pas dingue, ça va, ça, non ?


    Vous n'êtes pas l'arbitre des élégances, ça n'est pas à vous de dire si je suis ou pas dingue. Je suis moi et vous n'avez rien à dire. Vous êtes dans le jugement. C'est comme la morale, le bien, le mal.


    Ah l'axe du mal, vous me taxez de bushisme maintenant. Je ne sais pas ce que vous avez, mais vous arrivez toujours à me foutre en colère. (Il se retourne). (Ca y est, elle a encore tout faux. Elle sent que cet homme est à l'exacte limite de son seuil de tolérance. Il est macho, il n'a pas de doute sur lui-même, il pérore insupportable, mais il est sacrément séduisant). (Elle baisse la tête, va-t-elle mettre de l'eau dans son vin ?).

    _______________________________________________________________________

    Acte VI



    Vous croyez aux amitiés qui deviennent des amours ?

    Oui. J'ai déjà vécu cela.


    Mais vous n'êtes pas en couple en ce moment ?

    Non.

    Alors, cela n'a pas duré.

    Non.

    Pourquoi ?

    Parce que la passion est arrivée pour quelqu'un d'autre.

    Ah, parce que vous vous ennuyiez ?

    Non, je n'avais jamais connu de passion. Alors j'ai été fascinée.

    Vous voulez dire que la passion est plus intéressante.

    Oui, au début, elle vous révèle à vous-même. Elle pointe votre état de décomposition. Puis vite, elle devient étouffante, elle brûle tout sur son passage. On ne vit rien de réel dans la passion. C'est un pur fantasme. La passion c'est un ravage.

    Oui, je suis d'accord.

    Ah, vous connaissez aussi ?

    Oui. J'ai mis trois ans à m'en remettre.

    Dépression ?

    Non, je me suis plongé dans le travail.

    Ah, oui, votre réponse habituelle : la technique. Corriger les défauts, pour se libérer de tout ce qui est mal allé.

    Oh, arrêtez-vous. Vous me fatiguez. La technique, c'est un métier comme un autre. Et le travail, c'est le meilleur antidote contre le chagrin d'amour.

    Vous en êtes sortis il y a longtemps.

    Oui, depuis plus d'un an. J'ai vécu quelques mois une histoire sans lendemain. Maintenant, je vais bien.

    Heureuse de vous l'entendre dire.

    Et à propos, je vous ai apporté des huîtres délicieuses.

    Des huîtres, pourquoi vous m'apportez des huîtres ?

    Je viens de vous le dire, j'ai un petit ostréiculteur qui installe son étal le samedi matin, en bas de ma rue. Il fait des huîtres royales, à la fois savoureuses et nourrissantes.

    Hum, délicieux, j'adore les huîtres.

    Vous voulez qu'on mange des huîtres maintenant ?
    (Des huîtres, hein ? En est-elle une huître ? Qu'il veuille l'ouvrir à tout prix ?).
    <o:p> 
    </o:p>
    Oui, on peut aller chez moi, manger des huîtres.
    <o:p> 
    </o:p>
    Chez vous, manger des huîtres ?
    <o:p> 
    </o:p>
    Alors c'est oui ou c'est non. Ne me dites pas que c'est contre votre philosophie de l'autonomie.
    <o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p>_____________________________________________________________________________________

    </o:p>
    Acte VII
    <o:p> 

    </o:p>
    Non, des huîtres, oui, enfin, je veux dire, pourquoi pas. 
    <o:p> </o:p><o:p>
    Oui. J'ai tout préparé à la maison, une bonne bouteille nous attend, un vin d'Alsace.
    <o:p> </o:p></o:p>(Elle sent l'invitation se refermer comme une nasse sur elle. Elle décide de réfléchir pour savoir ce qu'elle veut vraiment). D'accord. A tout à l'heure, je vais au massage chez Nora.
    <o:p> 

    </o:p>
    OK. (Il a l'air rassuré). (Quand elle se retourne avant de fermer la porte, il est étendu sur le banc de mosaïque).
    <o:p> </o:p>(Mais réfléchir avec les mains de Nora sur elle, c'est un problème. Elle frotte dur, même pas dans le sens de la colonne. Elle va lui tordre quelque chose, c'est sûr. Mais bon).
    (Manger des huîtres n'engage à rien. En plein jour. Pourrait être un sérial killer. Non, elle n'y croit pas. Trop articulé, sent trop la bonne petite névrose obsessionnelle. Enfin, on ne sait jamais. Prévenir Marion, pour qu'elle puisse l'appeler sur son portable, au cas où ça n'irait pas. Non mais elle est folle, si elle a un doute, elle ne devrait pas y aller. En fait elle n'a pas de doute, mais elle se protège au cas où).
    <o:p> 

    </o:p>
    (Elle revient et s'étend mollement sur sa couche).
    <o:p> 
    </o:p>
    Alors, c'était bien avec Nora ?
    <o:p> 
    </o:p>
    Oui, un peu trop énergique à mon goût. Mais ça va. (Elle se retourne et s'endort quelques minutes, puis se lève et lui fait signe). Vous me donnez quelques minutes, il faut que je passe un coup de fil. Et après on y va.
    <o:p> 
    </o:p>
    Pas de soucis. Je vous attends.
    <o:p> 
    </o:p>
    (Elle appelle Marion. Mais personne ni sur son portable, ni chez elle).

    Il la rejoint. Tout va comme vous voulez. (Elle, regard effarouché).
    <o:p> 
    </o:p>
    Bon, je vais chercher ma moto. Vous êtes motorisée ? 
    <o:p> </o:p>Non.
    <o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> 

    _________________________________________________________________________________________

    </o:p>
    Acte VIII
    <o:p> </o:p><o:p>
    (Il arrive sur son destrier gris argenté). Vous montez ?
    <o:p> 
    </o:p>
    Euh, j'ai réfléchi. Je voudrais rentrer chez moi me changer. Vous ne voudriez pas plutôt venir à la maison ?
    <o:p> 
    </o:p>
    Ah, oui, je vois. Si vous voulez. Je repasse chez moi, je prends la bouteille, les huîtres et j'arrive.
    (Ouf, ça a marché. Il n'a pas l'air de se douter de sa trouille. Ou il fait semblant. Enfin, l'essentiel, c'est de jouer la montre.)
    <o:p> </o:p></o:p>Voici mes coordonnées. On se retrouve, mettons vers 20 heures ?
    <o:p> 
    </o:p>
    D'accord. A tout à l'heure. Vous ne me posez pas un lapin, là ?
    <o:p> 
    </o:p>
    Non, vraiment, je prépare un apéro. Et puis un dessert. On fera une petite dînette.
    <o:p> 
    </o:p>
    Bon, bon. Entendu. A tout à l'heure.
    (Il redémarre sa moto. Pétarade.)
    <o:p> 
    </o:p>
    (Bon, maintenant, il faut qu'elle joigne Marion et Romain, son voisin. Qui surveillera. On ne sait jamais).
    (C'est pas simple de se rencontrer de nos jours. Un inconnu. Jamais vu avant. Pas repéré dans le réseau de copains. Même quand ce sont des copains de copains, on a parfois des surprises. Comme pour Philippe).
    <o:p> 
    </o:p>
    (Oui, Philippe, celui-là, compliqué. Elle ne s'y attendait pas. Un bon ami de... De qui, déjà ? Ah, elle a oublié. Comment l'avait-elle rencontré, Philippe ?)
    <o:p> 
    </o:p>
    (Ah, oui, au Salon du Livre, il a reconnu Sandra, elles étaient ensemble. Il lui a tout de suite plu. Un peu vaniteux, mais pas désagréable. C'est allé très vite avec Philippe).
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  • Commentaires

    1
    Tiara
    Vendredi 15 Juin 2007 à 06:18
    Hamman
    Ce soir là, il m'a parlé en Turc et ne sachant même pas un mot de Turc, je lui répondit : Hamman ! Sublime sensation que cette rencontre : la sensation d'enveloppe commune nous innonda tout le temps de cet instant furtif...inévitable souvenir profond d'un "oublie pas". Inexorable retour au hamman, bain purificateur et salvateur et ainsi sans fin, sentir cette chaleur si profonde. Brillant sceau d'évidence.
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    2
    Tiara
    Vendredi 15 Juin 2007 à 06:18
    Hamman
    Ce soir là, il m\'a parlé en Turc et ne sachant même pas un mot de Turc, je lui répondit : Hamman ! Sublime sensation que cette rencontre : la sensation d\'enveloppe commune nous innonda tout le temps de cet instant furtif...inévitable souvenir profond d\'un \"oublie pas\". Inexorable retour au hamman, bain purificateur et salvateur et ainsi sans fin, sentir cette chaleur si profonde. Brillant sceau d\'évidence.
    3
    Tiara
    Vendredi 15 Juin 2007 à 06:19
    Hamman
    Ce soir l� , il m\\\'a parl�© en Turc et ne sachant m�ªme pas un mot de Turc, je lui r�©pondit : Hamman ! Sublime sensation que cette rencontre : la sensation d\\\'enveloppe commune nous innonda tout le temps de cet instant furtif...in�©vitable souvenir profond d\\\'un \\\"oublie pas\\\". Inexorable retour au hamman, bain purificateur et salvateur et ainsi sans fin, sentir cette chaleur si profonde. Brillant sceau d\\\'�©vidence.
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