• Vidéo/film - Sylvie Fleury - 2003 (droits réservés)



    Voir aussi installation au Domaine de Pommery - 2004 - dans les caves du Château.


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  •  Gemalde Galerie - Berlin


     


    Hpss. Scusez-moi !
    (il a trop bu. C'est le copain de la voisine du dessous)
    C'est mon sac. J'voulais pas vous bousculer. L'est lourd.
    Bonne Année à vous. (tu parles que c'est son sac qui l'a fait trébucher. Il est saoul).
    K'est-ce que j'vous ai dit ? Ah, oui. Hpss. Bonne Année à vous aussi. J'attends Lise. Elle porte les courses. C'est lourd dans l'escalier.
    (Peut-être après tout. Il parle pas si ralenti. Peut-être qu'il est pas saoul. J'entre chez moi)


    Tires-toi ! Mais j'te dis d'te tirer. Tu vas t'tirer, j'te dis. Tu vas pas m'emmerder. Boum.
    (Bruit de porte. Je déteste ces gens qui font du bruit. Je déteste les scènes).
    T'es qu'une pute. T'es qu'une pute. Salope. (Il cogne sur la porte. C'est lui qui cogne.)
    Fous le camp !


    (C'est la voisine du dessous. Elle aussi a trop bu. Son copain l'a rejoint. Ca se passe mal. Elle crie. Elle le vire.
    Encore un. Une fois de plus. C'est son syndrome de répétition. Elle sort avec un mec. Il boit. Elle le vire. Elle en reprend un. Il boit. Elle le vire. Toujours la même histoire. Elle vit avec sa mère. J'ai pas bien compris si elle est comptable ou si elle fait les marchés)





    (Elle porte les fringues que je jette. Je les retrouve sur elle. Elle va les chercher dans la poubelle. Un de mes anciens chemisiers lui va très bien. Je l'avais acheté chez un soldeur, pas cher. Il y a plus de dix ans. Avec de belles jupes, il passait bien. Elle ne se cache pas. Elle dit : j'aime bien tes fringues)


    Je ne sais pas quand on s'est mis à se tutoyer. Entre nous le tutoiement n'est pas le signe de la confidence, mais la trace d'une solidarité existentielle. Nous n'avons jamais parlé plus de deux minutes ensemble. Entre nous, il n'y a que ca, la reconnaissance que nous misérons elle et moi dans la même vie.


    Drôle d'immeuble où je vis depuis que le petit a trois ans. La vie sans le mode d'emploi. Un immeuble de la quotidienneté humaine. Et des fois la misère, la voisine du dessus, c'était).


    Ah, madame. Bonsoir.
    (lui c'est le flic)
    J'voulais vous dire, pour la voisine.
    Hum ? (à lui je ne veux même pas dire un mot, il est l'indicateur, le pétainiste né, cela se lit sur le visage. Lui me denoncerait, sûrement.)
    Oui. la voisine. Elle fait souvent du bruit. J'ai prévenu la police.
    Hum. Hum
    Bon,  j'espère qu'elle va se calmer. Parce que ma mère, vous comprenez.


    (Je viens de descendre le sac-poubelle. Il frotte contre les marches. Cela fait un bruit de papiers, un son plus mat, plus lourd, peut-être une boîte, ah oui, le petit coffret que j'ai jeté. Je n'aime pas le geste de relever le sac pour l'introduire dans le container. Trop lourd).


    (Dans le hall, elle est là.)
    C'est lui qu'a renversé le vin dans l'entrée ?
    Oui. Il a renversé le vin. C'est sale, hein ?
    Ton copain, il fait du bruit.
    Oui.
    L'autre jour, j'avais des amis a manger. Il hurlait dans l'immeuble.
    Oui. J'suis désolée.


    Ah tiens ! Attends ! Tiens j't'ai gardé une barquette de fraises. Mais attends ! M'obliges pas à te suivre au 4ème.
    Ah, excuses-moi. Merci. J't'avais pas entendu. Tu dis, des fraises. Oh ! merci. Fallait pas. (Finalement, elle travaille sûrement au marché. Les fraises, elle les a eues gratis ! C'est pour se faire pardonner pour les conneries de son mec, les cris dans la cage d'escalier et la vinasse dans l'entrée de l'immeuble).

    J'ai passe les fraises sous l'eau. mangé une fraise. Elle est pas bonne. Vaut pas les fraises de chez le Tunisien.


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    One Million Kingdoms, 2001, Beta digital, 7 minutes




    Oeuvre de Pierre Huyghe (droits réservés)

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    Tes yeux noirs, tes cheveux pâles, ta petite moue volontaire, et surtout, oh surtout tes petites jambes si actives, escaladant, marchant avec élan. Je me souviens de la longue promenade dans les forêts de sapins, il y a quelques jours.

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    Notre promenade, il y aura eu une fois, notre promenade.

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    Il y aura eu aussi nos chansons, celles de Laetitia que je lui chantais enfant et que tu as apprises. Je me souviens de ton regard surpris, du coup d'œil à ta mère, quand tu as découvert que ta grand tante les connaissait aussi ces chansons. Transmission de tante en nièce et en petite-nièce. Et puis on a enchaîné les couplets et les refrains. Et je t'en ai apprises d'autres de ces petites comptines.

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    Je t'avais promis une autre chanson, une chanson à toi. Laisse-moi un peu de temps, car cette chanson-là ne viendra pas si aisément.

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    Il y aura eu aussi ces baisers que tu m'as faits à la fin de la journée, bien à toi, plantés sur mes joues comme on noue la chaîne de la transmission, les liens de famille. Pas les bisous convenus qu'une petite fille bien élevée sacrifie du bout des lèvres en disant bonjour. Non, les baisers spontanés, les baisers d'élan de corps, de bon gré, quand la journée fut dense et rieuse, en guise de conclusion.

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    Je garde de cette rencontre avec toi, petit être de lumière, une si vive impression, entrée tout droit dansma vie.

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    Repartie si vite, à peine arrivée, Repartie si petite, pas encore grandie. Te voir écolière, et enfant de sagesse, pré-ado et ado, jeune fille et puis femme, et puis encore rencontrer tes enfants.


     


    Jamais plus. Ton énergie aura été l'incandescence même, elle irradie encore.

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    Iris, j'ai toujours pensé que les êtres chers gardaient une trace en nous, une fumerolle qui jamais ne s'efface. Pérennité de l'éther, je te la promets, ton éternité en nous.







     


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    Le Grand Sommeil


    Installation de Claude Lévêque


    (Mac Val – Droits réservés)

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    Vous êtes entré dans un rêve, un rêve tout éveillé.

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    Dans ces lits-là, on ne dort pas, on lévite. Absence de gravitation, votre tête tombe en arrière. Humeur viscontienne, Le nave va, un peut-être baron de Münchhausen perché sur son balais, tout est déjà onirique, et vos yeux hypnotisés ne se ferment pas.

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    Accroché au ciel, dans une improbable voie lactée, cet hospice, cet orphelinat, aux barreaux de fer d'un autre temps, vous rappelle que des enfants y naissent, des malades y souffrent, des agonisants y meurent. Encore que, meurt-on vraiment au firmament ?

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    Au-dessous, des boules du Loto de la vie, des boules de blancheur phosphorescente dans des vasques transparentes, s'agglutinent  en molécules déstructurées, l'étrange géométrie qui se donne à voir est sans doute une mathématique, issue d'un savant calcul sur un boulier chinois. Compterez-vous les moutons, un, deux, trois, je pose quatre et je retiens un.

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    Je recommence, j'entre dans un billard nocturne, un néon éclaire d'un pâle halo la boîte de nuit vide, lendemain de disco. Il me reste à parier mes cauchemars, pour qu'un Dream-catcher les efface. Mais la trace reste indélébile sur l'ardoise magique.

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    M'aiderez-vous à déchiffrer l'encre de cette écriture inconnue ? Elle s'est incrustée sur les parois de mes neurones. Les lignes cosmiques se sont installées dans le coin kabbaliste de ma boutique obscure. Le travail du rêve ne pense pas.


     


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  • Sculpture de lumière de Pierre Huyghe (droits réservés)







    L'autel est posé, un lieu surnaturel, entre Vésuve et Delphes. L'heure mystique est sonnée.

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    Quel est ce four d'Hadès, nom qu'on ne prononce qu'avec parcimonie par crainte des mauvais augures, qui nous ouvre ainsi les portes de l'enfer, façon conte de fée, romantique, éphémère ? Quelle Eurydice recherchez-vous qui vous fera franchir les limites, tel Orphée ?

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    Les fumerolles intriguent, attirent, osera-t-on mettre la main ? Approchez, approchez. Le feu est sans doute quelque part dans le fond. Quel enfant guettera, Anne, ma sœur Anne, que vois-tu donc au fond du puits ? Le curieux s'y fera ravir, l'innocent absorber.

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    Le dais n'offre aucun lit à la sérénité. Etendez-vous là-bas et votre compte est bon. Le roi est nu, brûlé, mais il respire encore. Couche impossible, no sex, no future.

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    L'enfer médiatique est là, séducteur et rapteur. A quelle ascèse hindoue voudrait-il nous initier, quand le temple se livre ainsi, saint des saints et tout le saint-frusquin, impudique, tout donné ? A celle du virtuel, qui clinque et qui clignote, à celle d'un jeu puissant, chemin initiatique vers un hypothétique dragon.

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    Morts par fluorescence statuaire, Pierre Huyghe nous condamne à la chaise médiatique, gaz et électricité au seul étage qui vaille. Qu'elle était belle cette mort promise comme une soumise.

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