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    la tartine n’est pas beurrée au petit déjeuner de l’enfance on écope l’eau de rien on est hésitant dans le paysage d'usine la sculpture qu’on a en soi est ébranlée on n’a que la main raide dans le gant de veau mais on s'appuie sur l'humour d'un regard qui insiste même à découvert à pied sec sur la grève le doute mais jamais complètement qu'un Proust nous retourne le cheval en chemin de Damas on peine rien n’est acquis on va piètre mendiant pauvreté de nos syllabes chaque jour la liste de nos mots les tentatives sempiternels aveux d’incertitude jusqu'à la muraille où se cachent nos clés et nos poires pour la soif on finit toujours par y trouver la source et on repart


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    on ne les compte jamais sur le fil, parfois un compteur y suffit sur la ligne, on les aime pour leur liberté, même si dans le poème elles résistent à Ponge ou s'effleurent en comptine d'une Louise, quand d'un repli de l'aile elles basculent ne laissant au regard que ce profilé du vol qui fuit à l'horizon, elles deviennent écriture, juste un délié, mais leur encre jamais ne s'assèche, plongeant d’un toit imaginaire on leur voit des traces dans la neige, faudrait leur mettre des moufles aux hirondelles un cache-nez un manteau les emmitoufler pour les protéger mais sans cette grâce d’éphémère que quelque plume abandonne qu’aurait la phrase pour durer.

     

    (Archive 2014)


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    la deuxième lettre de l’alphabet en hébreu, et on est à soi-même son propre hébreu, on entre dans l'antre, mettre dans la poche noire ce qui ne saurait se réduire à une imitation, tant d'autres grands ont écrit leur abécédaire, alors on veut en faire mystère tant qu'on n'est pas au bout de ses mots, ici, on skippe le a, là que tout commence, l’avant est le point d’origine perdu dans le tableau comme l'est le point de fuite, mais pas dans le futur de la peinture, il n’annoncerait rien de toutes manières, on n’a pas fui, on a juste avancé et lui est devenu la trace lointaine d’un arbre de bordure de nationale dans le rétroviseur, on se retrouve debout, on naît au salut des copains, à la montée dans le train, dans les bras de celui qui vous fauche, peut-être ça, le n qui nous fait advenir, ou le n, quand on est un quidam, liberté des dessous de draps dans la grande ville, berechit, se croire allogène comme si jamais prise dans la matrice, on se trompe, on ne fait que succéder, mais peut enfin démarrer la suite, ainsi quand on fait le tri, dans l'abécédaire on trie les mots, dans le tamis qu'on voudrait de hasard, comme si c'était possible

     

    (archive 2014)


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  • crédit photo anthropia # blog

     

    Road Party au Point imaginaire, un texte de Dominique Hasselmann (ici)

     

     

     

     

     

     

     



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  • Double Play

    John Baldessari

    Just the right bullets

    crédit photo anthropia # blog

     

    Elle entre dans cette pièce souterraine du parking Saint-Germain l’Auxerrois, celui devant qui capte, comme on dit détourne, l’entrée de l’Eglise, située derrière, la paroisse des artistes, dit Wikipedia, bien vu, car ce jour-là elle a un petit service artistique à demander à un copain.

    Tout a commencé comme ces aventures parallèles aux boulevards, ou plutôt comme un appel au secours qui nécessite le petit adjuvant ne payant pas de mine mais sans lequel aucun projet ne peut aboutir.

    Sa filleule d’une galerie parisienne fer de lance de l’art contemporain l’appelait paniquée, il manquait un branchement électrique à un artiste, -c’était de Ben Kinmont un hommage à Christopher d’Arcangelo, le plasticien new-yorkais-, pour qu’il puisse réaliser sa performance, brancher une photocopieuse et réaliser des photocopies pour les passants de la rue de Rivoli, -elle avait oublié ce qui se projetait sur ces feuilles blanches et ce qu’elles auraient révélé à celui concerné qui se serait approché d’un peu plus près-, mais pour que cela advint la filleule attendait d’elle quelque chose qu’elle ne se savait pas posséder.

    Elle aimait bien ce genre de demande, elle se souvint du jour où un grand du baroque avait sollicité un ami pour réaliser la bande-son du premier son-et-lumière après réfection des fontaines du Château de Versailles, en baroque bien sûr, la vraie, celle qui consiste à ne jouer qu’avec les instruments d’époque, ceux qui sonnent un peu faux mais qui emportent le temps dans leurs cordes, la baroque des baroqueux qui retrouvent les vieilles partitions au fin fond d’une bibliothèque pour exhumer les morceaux oubliés, ceux des matins du monde qu’on connaît déjà avant de les lire et de les voir en film, de ces beautés espagnoles d’un Hespèrion XX, chantées par Montserrat Figueras ou de ces émotions pures quand Henri Ledroit  grimpait dans les aigus emportant les graves comme contenues dans les notes hautes, voix chaude jamais acide, -on rejoignait Lille pour un soir, juste pour l’écouter et boire un verre avec lui après le spectacle-, bref, de ces musiques qu’ils se mirent tous deux à choisir dans ce qui devait être une des meilleures discothèques de musique baroque de la place de Paris, puisque le grand l’avait dit, puis à enregistrer sur le Nagra, puis à se précipiter, à parcourir de nuit les territoires du parc d’une fontaine à l’autre, repérages puis installation, les magnétos, les amplis, peu de temps avant la dead-line il fallait courir pour que d’un jet d’eau à l’autre l’arrivée dans la lumière signifie aussi l’arrivée dans un univers, comme un parfum le son convoque le décor et niche un climat en quelques secondes.

    Bassin d’Apollon, Bassin de Flore ou du Printemps, Bassin de Cérès ou de l’Eté, Bassin de Bacchus ou de l’Automne, Bassin de Saturne ou de l’Hiver, Bassin du Dragon, Bassin de l’Encelade, Bassin du Fer-à-Cheval, Bassin de Latone, Bassin du Miroir d’eau, Bassin de Neptune, Bassin des Nymphes de Diane, Bassin de l’Obélisque, Bassin de la Pyramide (1)

    Mais ce jour-là, c’était longtemps après, la voix au téléphone demandait, pourquoi à elle, elle ne savait, il y a de ces rhizomes souterrains entre gens qui s’aiment, comme s’ils sentaient en eux l’intuition que la demande ne sera pas vaine, et elle ne le fut pas.

    Elle se rappela avoir rencontré dans ses Monts de Lacaune le frère d’une amie qui pédalait, un pédalage écologique pour de la livraison de plis et produits en tous genres sur un pousse-pousse, dont le chef-lieu se situait justement à quelques pas de l’italienne traversante, son siège social, cette cave de la place du Louvres, premier sous-sol, un entrepôt plutôt, on n’y ferait pas attention si on venait s’y garer, le portail fermé de même couleur que les murs, blancs, de ces endroits du labyrinthe où on ne sait que derrière se cache une autre vie, d’autres hommes qui travaillent, même pas en second jour, ici que la lumière des néons pour éclairer, mais les fourmis ressortent bien vite à mouvoir les pousse-pousse jaunes, (sortes de vélos à cornettes articulés à une remorque, ne sait s’ils étaient jaunes en hommage aux lointains et bruyants cousins de N.Y.), à explorer de jour les sentes parisiennes, à exercer leurs muscles sur le bitume en montée ou descente et d’abord comme sur une piste de décollage et d’échauffement sur la rue de Rivoli.

    Et voilà elle y est, et la gentillesse du copain à sortir cet énorme câble le dérouler sur des dizaines de mètres jusqu’à l’auguste photocopilleur, qui va générer l’installation de la scène comme on la nourrit, un tuyau salvateur, une énergie pulsatile qui rend possible l’art, merci La petite reine, c’est le nom de cette obscure société, qui permet à l’artiste d’éclairer le monde.

    La performance a lieu et comme souvent dans l’art, quand les artistes donnent le courant et entraînent à leur suite d’autres moins connus, dans une ronde de création, celle qui puissante emmène au monde passe le relais encourage donne envie, d’un Matisse à un Proust, les bleus du paysage qui s’incorporent aux êtres, cette gaie ritournelle ou moins gaie peu importe, qui sauve les envies, fait avancer et créer avant d’irriguer une inspiration, l’occasion fait la muse pour une lecture d’un texte juste fini, Oued Zem/Là-bas, roman inédit n’a pas vraiment de titre, et là quelques semaines plus tard devant quoi dix, vingt personnes, au fond une table avec cakes salés et sucrés, jus de pomme, ce Saumur-Champigny qui fait les bons étés et poignées de marschmallows, ordinateur et vidéoprojecteur pour images du documentaire littéraire sur une ville arabe par Nicolas Barré (lien introuvable), elle lit sa mélopée, entrecoupée de cette petite phrase musicale orientale qu’elle avait rapportée de Oued-Zem, d'origine turque, mais pour elle pour toujours liée à ce bourg marocain où elle avait passé un mois tout entier à ne pas parler la langue d’une famille qui ne parlait qu’elle mais qui savait chants et puis danses, langage universel, elle ne sait plus de qui est cet air, -elle l’a perdu dans les entrailles de ce Sony portable, abandonné avec ors et métaux précieux chez un ferrailleur-, juste qu’il a ce pouvoir fascinatoire d’une millième nuit, elle pourrait le chanter, et devant un public qui l’écoute lire dans son pousse-pousse magique, dans cette obscurité de l'antre qui peut mieux qu’en nul autre endroit apporter les ombres d’une médina, les mystères d’un passé colonial et le fragile Ajej qui agite les mikas, elle ose lire pour la première fois et en public, un texte.

     

     

     

     

     

     



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