• crédit photo anthropia # blog

     

     

     

     

     

    C’était un dessin, où on distinguait deux visages côte à côte, ceux de deux hommes qui avaient l’air de s’amuser, l’un blond tout frisé, et l’autre au cheveu court et noir, plutôt latino. Leurs têtes semblait sortie d’un Jack-in-the-box, même si elles ne pendaient pas au bout d’un ressort et ne portaient pas de cornes, c'était pourtant celles de deux diables, un de trop sans doute tant il est inaccoutumé d’imaginer deux diables pour une seule planète, deux malins qui étaient passés par la case médiatique, costard soigné, maquillage TV, l’air bronzé et démagogique que doit prendre le mal par les temps qui courent. L’effrayante noirceur que je détectais dans leur regard contredisait leur sourire, dévoilant la distorsion intérieure, mettant le spectateur, en l'occurrence moi, dans l’incapacité de se faire une opinion sur ce qu’il avait sous les yeux.

    Je ne sais pas d’où venait le dessin, l'avais trouvé sur le fauteuil d’un théâtre un soir, ne me souviens plus du nom de la pièce, le carton était posé à ma place, comme s’il m’avait attendu, je l’avais d’abord pris pour le programme du spectacle, l’avais retourné croyant y découvrir la distribution, les petites informations ordinaires, le propos de la pièce, le nom du metteur en scène.

    Mais non, derrière, rien de tel, juste une mention manuscrite, «effervescence implicite ». A nouveau cette sensation d’impasse, l’indice de la contradiction au cœur même des mots, jusques et y compris dans cet écart entre les registres de langage de l’oxymore.  Plutôt qu'implicite, l’effervescence, pourquoi ne m’apparaissait-elle pas tranquille, apaisée ou calme, que sais-je ? Bref, marions les contraires, mais marions-les bien.

    En fait, je ne savais même pas si les mots se rapportaient au dessin au recto, et s’ils étaient contemporains, voire de la même plume ou du même stylo. A observer de près le tracé, l’épaisseur des traits, la couleur de l’encre, je penchai pour un scripteur différent du dessinateur. J'aurais tout aussi bien pu mettre tout ça au féminin. Je n'avais aucune représentation mentale de ces deux auteurs, et je ne parle pas là de l'image, ce qui les avait amenés ou l’un ou l’autre ou encore un tiers à venir déposer sur mon siège cette énigme.

    Et les mots ne passaient pas, « implicite » rajoutait à « effervescence » quelque chose d’un enfermement, d’un bouillonnement contenu, un effet cocotte-minute quoi, qui rendait presque menaçante l’expression. Et de la trouver là, à ma place, prenait la valeur d’une lettre anonyme, d’un message à bon entendeur. Je décidai de jeter l’étrange invitation à terre, m’assurant des deux pieds qu’elle n’en bougerait pas.

    Mais ces deux Méphistos ne me laissaient pas en paix, j’en étais toute empêtrée, comme s’ils avaient ricané sous mes chaussures en se jouant du cuir pour le traverser se collant à ma peau. A tel point qu’avant même les trois coups, je m'étais levée, avais ramassé la chose, l’avais portée d’un bout de doigt, dégoûtée, pour la déposer sur un strapontin à l’autre bout d’une rangée où personne ne s’était encore assis, et étais revenue mine de rien m’asseoir à ma place non sans un long regard interrogateur de mon voisin. Je sais, je n’en étais pas très fière, me sentant ravalée par la superstition, dont je venais de faire l’éclatante preuve, à l’état d’esprit bêta, femme de surcroît, je prêtais le flanc à tous les clichés sexistes de la terre. N’empêche qu'à mon retour je m’enfonçai confortablement dans les bras de velours cramoisi, sans le moindre regret.

    Pourtant, à ce moment où le monologue de l’acteur principal prenait un peu ses aises avec ma patience, je commis l’erreur de jeter un œil sur la rangée plus loin. Et vis alors ce à quoi j’avais échappé, une femme avait pris la place du diable, et, devant la vision qui s'offrait à moi, je compris tout de suite que ça lui était arrivé, que ce qui m’était destiné avait changé de direction, que j’avais provoqué la bifurcation fatale, que c’était ma faute, mais qu’en même temps, j’avais su m’en sortir, avais été plus maligne, je ne me sentais même pas coupable, je me dis simplement qu’elle aurait pu en faire autant et que si elle ne l’avait pas fait, c’était son problème, oui, son problème, enfin jusqu'à ce que, parce qu'enfin, il ne faut pas être malin pour ne pas remarquer ce qui d'emblée saute aux yeux et ne rien faire, n'a rien fait, mais qu'est-ce qu'elle avait donc en tête ce soir-là. 

    Dans un long soupir, je repoussai alors mon dos très loin dans le coussin et me concentrai sur la pièce.

     

     

     

     



    votre commentaire
  • More cheeks than slaps

    néon mirror, 2011

    Mircea Cantor

    Credac

    Crédit photo anthropia # blog

     

     

     

     

    Bout de rien 1

    La femme avance droit devant elle, indifférente à ce qui l’entoure, ses yeux sont légèrement ouverts, quelqu’un s’approchant de près y distinguerait un voile qui cache presque entièrement l’iris, le diagnostic peut-être une cécité, elle a le col sale et ce négligé qu’on voit aux aveugles esseulés, elle marche pourtant d’un pas rapide, supputation elle connaît le chemin. Elle parvient devant la grande dalle, là où toujours des gens aident, pour monter l’escalier, pour traverser et trouver la bonne porte, mais à ce moment-là personne sur la dalle. Elle attend.

     

    Bout de rien 2

    Un homme marche dans la rue, il est au téléphone, il parle fort, grande conversation, les affaires. Il ne prête pas attention. Seuls des murmures auraient pu l’alerter. Cachés en haut de la plateforme, des enfants passent la tête et ricanent. Plus tôt ils ont décroché un extincteur à l’entrée du garage, le plus grand s’en est emparé et vient de déclencher, un long tuyau tendu devant lui, il a descendu la rampe, s’est approché de l’homme à demi-retourné, et fait feu, vapeur, feu de cette neige aux quelques reflets bleus, l’homme prend sur le visage, sur les mains qu’il tend en avant, les petits tout autour trouvent ça amusant, ils rient, se bousculent, l’homme en silence devant le tir continu, puis de l’appareil ajuste et prend photo. Les petits alors remontent l’allée bétonnée et courent se réfugier derrière le muret du haut. Il dit : « j’ai la photo, j’ai la photo ». Deux quidam en bas bougonnent, on en faisait autant à leur âge. 

     

    Bout de rien 3

    Conversation comme ça dans la rue. Une fille, un garçon. Elle, t’étais où, hein, t’étais où ? L’autre, t’es pas ma mère, j’fais ce que j’veux. Elle, non, mais j’suis ta copine. Lui, ta gueule, sinon j’vais t’cogner. Elle, t’as pas le droit. Lui, fous le camp, j’aime pas t’aimer, tu m’emmerdes. Elle, salaud. Mais ils restent là l’un en face de l’autre. Le garçon lève la main.

    Une femme s’arrête, fait témoin, le mec, qu’est-ce que vous foutez là ? Rien. Foutez le camp. La femme reste. Alors il monte dans sa voiture et s’en va. La fille s’enfuit par le mail, se perdant dans les immeubles.

     

     


     

     



    votre commentaire
  • Juraj KOLLAR 099 2099

    2099

    Jeune Création Européenne

    Salon de Montrouge

    Crédit Photo Anthropia

     

     

     

    Casse-auto

    Un roman d'Anthropia

    Extrait

     

    Lors de ses pérégrinations, elle avait découvert un musée tout proche, qui présentait des collections de papier peint du patrimoine local. Le musée était installé dans une vieille maison de maître, une ancienne manufacture de tapisseries, ornée de décors panoramiques somptueux, mettant en scène l’histoire coloniale. Ce n’était que scènes de ports exotiques, brigantins aux voiles blanches. Sur les quais en bois d’acajou, des voyageurs enturbannés cheminaient suivis de portefaix hâlés ployant sous les bagages et plus loin, des femmes au teint clair, revêtues de délicates robes à crinolines regagnaient leurs maisons à colonnades, tandis que des servantes, portant caracos de madras et chemises blanches, fermaient la marche.

    Elle avait d’abord aimé les impressions chamarrées de ces salons bourgeois du dix-neuvième siècle ; elles suscitaient même une vague nostalgie chez elle. Puis peu à peu, ce sentiment se transforma en irritation : ces mises en scènes de « mondes parfaits » avaient un côté conventionnel, qui la gênait. Elle aurait volontiers détourné les motifs du papier peint. Elle aurait conçu des panneaux pour chambre de garçon avec des scènes de la vie d’aujourd’hui. Pas les sujets naïfs habituels ou des scènes issues de dessins animés, elle s’imagina dessiner des papiers peints inattendus, à la manière de ces scènes de pendaison du KKK dessinées par Robert Gober. De loin, ce n’était que bluette, on s’approchait et on avait tout à coup le sang glacé.

    Elle aurait représenté des casses-autos, des carcasses de voitures, des engins de levage, des pièces détachées d’occasion. Elle aurait ajouté des plans de véhicules à la Léonard de Vinci, mais cabossés, le plan de leur forme après les accidents. Elle aurait réalisé le croquis d’un objet, non dans sa forme d’usage, mais dans son devenir ultime, dans sa forme de mésusage en quelque sorte, comme un présage de ce qui ne peut manquer d’arriver.

    Dans cette Alsace de l’automobile triomphante, près du fief des Peugeot, elle aurait montré des cimetières de voitures, là où les autos finissent toujours par arriver, l’envers du décor. Et ce n’était pas chose facile, parce que des maisons bleues à colombage aux usines au crépis rose, et même les hangars, tout avait l’air pimpant ici ; une plaquette touristique. Même les casses-autos étaient esthétiques en Alsace. Elle se rappela l’une d’entre elles, entourée d’une palissade repeinte de frais, avec, par-dessus les empilages d’autos, une grue d’un jaune flamboyant, presque un jouet en taille XXL.

     


    votre commentaire
  • Sarah Bernardo

    Disembody

    2009

    Portugal

    Salon de Montrouge

     

     

    J’allais une fois par semaine chez Mlle Masson. Elle avait moustache drue au-dessus des lèvres, un air toujours bon enfant, des yeux marron malicieux, quelque chose de l’écureuil en elle. Je l’imaginais dès la montée des escaliers, sur les marches de bois cirées, à large gire, recouvertes d’un épais tapis. L'odeur de cire a longtemps fait office de madeleine, une promesse de joie, une prémisse de musique.

    Mademoiselle Masson était ma mère en piano. Je l’avais surnommée, Ma Son, à l’américaine, quand Aliette m’avait expliqué le sens du mot Ma. Ma Son m’apprenait à identifier et à faire miennes les notes du piano, celles qui se marient, celles qui dissonent, qu'on laisse filer jusqu'au bord du supportable, jusqu'à ce qu'un rétablissement remette l'accord en ordre.

    Avec Mademoiselle Masson, j’avais découvert l’accord parfait, puis le dièse, le bémol, les clefs de sol et de fa. C'est à peu près tout, je n’étais qu’en première année. Parfois, j’aurais volontiers entraîné ma professeure dans un mineur alangui, qui ne se serait pas rétabli. Mais elle avait le sens du joyeux, Ma Son, la tristesse, elle ne l'envisageait que quelques minutes, ne supportant que mal ces bords d'abîmes, dont on ne sait si on reviendra entier. Elle ne me laissait pas faire. Comme si elle sentait en moi un fonds de mélancolie. Le mode majeur était entre nous comme un pacte de bonne santé, un retour à la réalité qui ne souffrait pas le doute.

    Avec elle, j’appris à jouer à quatre mains. Dans ma famille, j’ignorais ce qu’« ensemble » voulait dire, mais avec la musique, sur ce piano quart-de-queue que nous caressions de bonne humeur, dans l'entente tranquille d'un professeur et de son élève, nous prenions la clef de sol comme on prend la clef des champs, allions jusqu’à la coda, et ainsi de suite jusqu'à la fin. Certitude de l'ouvrage bien faite. Pas d'ambition folle du génie. Non, juste la tranquille harmonie.

    Bourgeois jeudis d'infante bien propre, bienveillance de la vie dans ces quelques après-midi. La fébrilité active des mères offre parfois et, sans doute par inadvertance, quelques instants de répit. J’y puisais de l’espoir. J’aimais le piano, ce n’était pas un devoir de répéter sur mon piano droit brillant un morceau pendant des heures, d’entraîner mes doigts à faire le petit pont, de délier mes épaules pour gagner en souplesse. Alors, sans doute que les filles étaient élevées à la broderie et au piano, comme on nourrit les poules au grain, dans notre milieu petit-bourgeois de province. Mais je m’en fichais.

     

     


    votre commentaire
  • Kader Attia

    Untitled Plasticbags, 2009

    La Force de l'Art

    Grand Palais

    Crédit Photo Anthropia

     

     

    Sur la carte postale de l'époque coloniale, c'était une gare, Oued Zem. Une modeste maison aux murs d'ocre jaune. Et devant les rails du chemin de fer, quelques colons à casque blanc. Pas de train visible. Oued Zem est attente. Latence de chacun, ni espérance ni projet, l'ennui Oued Zem.


    Lotfi murmure à mes côtés "Je vais te faire connaître Oued Zem, la ville la plus inattendue qui soit ; c'est là que j'ai grandi".

    Et je l'ai suivi. Pourquoi ? Je ne le sais pas.

    A présent, je contemple des maisons à perte de vue, des petites d'un étage, puis sur plusieurs mètres des maisons de trois étages, rarement de deux. Des carrées, des rectangulaires, toutes sans toit.

    Maisons de Maroc. Certaines à balcons ornés de mosaïques, qui se fondent dans le gris et dans l'ocre. D'autres à colonnades ou à arches simples, à fentes larges ou à myriades de fenêtres toutes différentes, non alignées. A portes découpées en dentelle ou à portes de bois sculptées. Diversité qui surprend, tentatives de m'as-tu-vu, envolées baroques d'ornements, mais laissant toujours deviner, quelque forme qu'aient les balustrades qui bordent les façades en leur sommet, la permanence d'un toit-terrasse offrant son visage au ciel de nuit. Pas de moucharabieh, on ne guette pas à Oued Zem.

    Le ton sépia de la photo n’était pas dû à la lente dépigmentation du temps qui passe, il correspond aux teintes poussiéreuses de Oued Zem. La ville est un instantané d'avant-hier, presque fossilisé. Quelques arbres gris aux troncs enduits de blanc jusqu'à terre. Seigneur de son univers, Lotfi m’explique. "Pour les protéger des insectes, on les badigeonne à la chaux". Ce qui leur donne cette allure de stalactites ensablées. Les arbres ne poussent pas, ils descendent sur terre. Ils ne sont pas encore tombés en cendre, mais combien de temps faudra-t-il attendre ?

    De la voiture, je note le blanc cassé, partout cette fausse blancheur, celle de l'à-peu-près. On n'a pas le luxe de repeindre ici. On laisse donc filer jusqu'au jaunâtre, les façades beiges étant légion. Je pénètre dans la matité absolue, dans l'effacement de la couleur. Je suis arrivée dans la photo.

    Et s’insinue en moi le sentiment que je suis prise au piège, comme un rat, un chacal, un lamantin échoué. Le mystère Oued Zem. Un labyrinthe qui réserve des oubliettes en tous genres. Des trappes qui pourraient s'ouvrir sur mon passage.  Ou des collets me prenant par surprise, après le croisement, quand je prends la rue perpendiculaire.

    Le boulevard est hostile. Slalom entre les nids de poule. A peine sauvée que des plaques métalliques en dos d'âne font cahoter le véhicule. J'évite soigneusement les ronces et détritus traînant négligemment, on ne sait jamais. Soupir de soulagement, qui s'interrompt aussi sec. Hirsute, un visage se plaque à la vitre. Je sursaute. Se méfier à Oued Zem. Rêve de voiture sur pilotis.

    La ville joue des tours à sa façon. Les rues attendent bras ouverts. Invitation à se vautrer, il y a de la place, prenez vos aises, à pied, en voiture ou en carriole. On aurait pu  y croire, vue la largeur exagérée des avenues ou l'abus de contre-allées. Mais ce n'est qu'un luxe apparent. Ne pas s'y laisser prendre ; les étendues de part et d'autre sont de terre jaune et au centre les artères sont bombées de bitume éteint et d'ornières.

    Au loin, la médina sculpte l’horizon, elle me parle d'un temps de la réussite, du succès, de l'abondance qui coulait à corne que-veux-tu, des noces entre le pouvoir et le peuple, entre le travail et la sueur, entre l'argent et les nantis. Mais qui a connu l'âge d'or ?

    Partout, il n’y a que chaleur sèche et ciel d'ocre, qui s'étend sur terre. Le soleil ne pointe pas, il fait masse. Il est la voûte de la cité, tellement lourd, que l'œil devient borgne à huit mètres du sol. Abdication de l'espoir d'horizon. Lotfi baisse la tête. "La honte cette ville".

    Soir de cafard pour Oued Zem, un long crépuscule. La ride de Lotfi, celle qui scinde sa joue, se burine un peu plus. "Quelle ville, mais quelle ville, j’avais oublié, tout est à l’abandon".

    On s'étendrait sur le sol et on attendrait la mort. Une ville condamnée. Oued Zem est une ville-fantôme.

    On s'étend sur le sol et on attend. Il ne se passe rien, mais on entend pourtant. C'est d'abord un chuintement, discret, lointain, un bruissement fait de sons inconnus. Et puis, vite, il faut bouger, se protéger. L'ajej est là, l'ajej intraduisible. Lotfi philosophe. "L’ajej, c’est un concept".

    Je comprends que c'est un vent, une bourrasque soudaine, une tornade d'à peine un mètre de haut, et que le souffle est chargé de poussière chaude, de sable et de détritus. Qu'en spirale sur lui-même, il gicle en piquant, il choisit les yeux, les jambes, les fenêtres des voitures, les passages entre les toiles tendues des échoppes au marché. L'ajej annonce le mouvement et la mort à la fois.

    Il rend Oued Zem encore plus immobile. Comme le souffle d'un ventilateur ne meut que quelques voiles ou papiers, l'ajej ne réveille que l'insipide et l'anecdotique. Il ne sait pas vivifier, il est la mouche du coche, qui échoue lamentablement. L'ajej ? Un soubresaut.

    Et agités par l'ajej, des mikas, des sacs de plastique marron, des nuées de sacs de plastique marron, qui s'écrasent aux troncs des arbres, aux flancs des maisons, aux pattes de quelque haridelle ou chèvre paissant dans la sécheresse des terrains vagues. Ils volètent tels des merles moqueurs, puis se figent en s'étalant, et plus tard reprennent leur vol planant. L'éternité des murs et la dérision du plastique. Le souffle du futile n'entamant pas le néant du solide. Vague crainte de sacs sales se plaquant sur moi.

    Je prononce le mot Ajej, comme on butine des fleurs des champs qu’on emporte dans sa jupe. Mon premier mot de Oued Zem. Et les yeux de Khadija s'allument, Khadija ?, c'est la sœur de Lotfi, qui nous attend devant la maison, je dis Ajej en la regardant, et avec Khadija, nous vivons notre premier échange, un sauve-qui-peut qui promet, un mot à partager, parce que nous n’avons pas de langue en commun. Juste Ajej en guise de bonjour.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique