• Le Vialas

    crédit photo anthropia # blog

     

     

     

    Ils entrèrent dans la ville la main dans la main, ils ne savaient à quel moment du voyage leurs chemins s’étaient trouvés, malgré l’affluence sur les routes et ces gens qui guettaient, personne n’aurait su dire, pas plus eux que les autres, quand la rencontre avait eu lieu. Ils marchaient sur la route chacun de son côté, et tout à coup on les avait vu se tenir la main, et c’était au moment où les premières rues de la ville étaient apparues, et c’était un matin bleu et transparent, et c’était cette image qui d’un coup s’était imposée à tous, qu’on avait là à faire à de purs fantâmes.

    Comment l’avaient-ils su, puisque le fantâme n’avait alors jamais été conçu, peut-être au détour d’un poème d’aucun en avait fait naître la fumerolle, mais on ne savait rien ni du terme, ni de ce qu’il signifiait. Et pourtant il ne fit aucune doute pour personne à leur vue qu’ils étaient les premiers fantâmes connus à ce jour, qu’ils répondaient en tous points à la définition du concept, « fantâme »,  germé de leurs deux imaginaires ou plutôt fondu sur eux dans la simultanéité d’un échange, car le mot faisait exister la chose par auto-engendrement, un énoncé performatif, « que cela soit » et cela est, une nomination.  Et le monde vit que cela était tel et bon.

    Encore que tout n'était pas clair, ces fantâmes remarqués avaient-ils une identité propre, on aurait ainsi un couple de fantâmes qui se seraient croisés, ou le mot réunissait-il dans une même entité les deux créatures, devait-on dire un fantâme et comprendre illico qu’en un deux cohabitaient, on interrogeait là le cœur même de l’idée, mais rien n'était arrêté.

    On chercha bien sûr à en savoir davantage, quelles étaient les conditions requises pour son apparition, en avait-on trace dans un calendrier visionnaire. En fait, on savait peu de choses et ce qu’on tenait était le fruit de l’observation et de l’écoute.

    Ainsi fut-on capable par un simple rapprochement de définir la configuration à la source de l'idée, deux fantasmes qui s’entrechoquent à l’orée d’une ville, des fantômes en poids sur leurs épaules, et une commune aspiration d’âme-sœur, chose qui n’arrivait qu’assez peu souvent, sans doute pour ça qu’on n’avait pas eu à inventer le mot jusque-là. 

    Mais un tel « trois-en-un »  amena les chercheurs à s’interroger sur les caractéristiques de la ville qui en avaient favorisé l’émergence. Et là, peu d'évidences.

    (feuilleton à suivre)

     

     

     



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  • crédit photo anthropia # blog

     

     

     

    Quand tu te fais dérober tous tes papiers

    écrire semble être un sûr moyen d'exister

    théoriquement oui théoriquement

     


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  • crédit photo christine simon

     

     

     

    Et dimanche, et lundi, et mardi

    On ne troque pas comme ça son vieux blog à près de 5 millions de visiteurs pour un plus chic site internet. Mais non, reviendrai ici pour publier quelques débris de semaine et quelques bouts de rien qui ont fait si longtemps mon journal du quotidien.

    Ici, mon imposture, ma gauloise posture, mes cris et mes humeurs, là-bas un peu plus policée, je hume aussi, mais sans le brut.

    Je revendique ici mon foutoir, mon labo à mille découvertes, mais encore combien de temps. Et puis ma salle d'archives et ça le restera.

    Prenez l’échelle que vous montez barreau après barreau, vous installez le pied, vous faites crisser la barre, vous le savez qu’il naît ici votre plaisir, mais sur la plage aussi, enfin, c’est de l'équilibrisme, ce changement de destrier, surtout quand vous restez la même et qu’à cheval, c’est la même littérature à l’œuvre, celle qui monte en vous qui fait surgir le râle et puis l'étourdissement, alors quoi, niveau de qualité exigée plus ardente, mieux coulisser ses fournitures, investiguer davantage avant de se lâcher, tout ça, oui, et surtout sur l’autre, à découvert, de soi une autre matière, celle du choix de ce temps nouveau que Proust a révélé, je veux et j’écrive, mon chemin entrepris tout ouvert.

    Si lecteur tu es parvenu à cette treizième ligne de celles écrites pour toi, sache que désormais, tu pourras me trouver autrement, autre personne, mais toujours là, au Point Imaginaire, http://www.christinesimon.fr

     

     


     


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  • crédit photo anthropia # blog

     

    Et vous scrutez la terre, mais elle, de givre, de sel, de cette suie étrange que n'avez jamais vue, n'a rien laissé passer, arrête la pointe d'herbe, combien de temps lutter pour traverser la croûte, elle est là, vous croyez, à quelques coups de pioche, vous n'avez pas l'outil et l'auto vous déprend de ce lieu qui vous tient, mais s'il faut insister, vous ne voulez que berce, est quelque part dessous, cette plante indigène qu'on trouve en Alaska, et si on file au loin on la verra à l'est de ce grand Saint-Laurent de fleuve au Canada, elle doit bien exister, vous ne confondez pas la cigüe, ce poison qu'on craint à la nuit noire, et votre herbe si verte, qui vainc le paysage, la berce qui fait champ, sa corolle de dentelle, maximum d'Héraklès donne le nom en latin, il en faut de la force pour triompher du sort, chez vous dans votre argile ressemble à l'angélique, la sauvage herbe à fièvre, protège les enfants, de la même famille que céleri en branche, embaume les midis, a ce tremblé des bords, mais ne pas s'y fier, la berce dont on parle a forme d'isocèle, en sa composition elle affirme le triangle,  quand elle se multiplie, ne voit plus que les feuilles, elle envahit les aires, que la branche s'éclate, qu'elle tourne sur sa tige, qu'elle pousse ses trois mètres et peu à peu le sol oubliera sa langueur, vous devenez la bartsch, mot qui désigne la plante dans ces contrées d'Europe, vous faites votre racine, prise dans la semence, vous pointez votre tête contre la crête de verre, vous poussez, vous poussez, vous le savez combien il faut persévérer et miser votre audace dans ce sortir à l'air, oxygène à respire et vous, ouvrir le cœur, la sève en soi qui tremble, frémit et se dilate, cette petite chaleur, elle coule dans vos veines, s'insinuent vos pétioles, s'épanouissent vos limbes, les sept à la surface, votre totalité, vous êtes la berce enfin, dans cette paume offerte, à vous pour consoler, un être de verdure, et à côté les autres, eux tous ensemble là, agités par le vent, dans cette effervescence qu'on appelle un printemps.  

     

     


     

     



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  • Eugène, sculpture d'Aurélie Fourier

    crédit photo anthropia # blog

     

     

    Sent la tension monter dans la pièce, vont encore se fâcher, le beau-père, le gendre, affaire de testostérone, pas vraiment même longueur,  l'un rough, couvant son silence, l'autre beau parleur, étalant, l'un de la montagne, l'autre urbain, deux civilisations, fait étincelle, et beau-père laisse l'autre pérorer, faire son important, et quel que soit le sujet, finit par éclater. Et dans ces cas, plus rien n’arrête tempête, parce que, question colère, se ressemblent, éclairs se répondent en écho, jusqu'à, l'un décampe avec cliques, femme et enfants, l'autre dise, bon débarras. Et elle tout reconstruire, remettre du liant, pour que tous là ensemble une prochaine fois.

    Elle, d’expérience, un de ces moments de danger imminent, à deux doigts de, interrompre sans délai l'escalade, qu'on le finisse tranquille ce dimanche, que leur dispute ne ruine pas ce moment de quatorze, le repas, si bien passé jusqu’ici. Sauver le dimanche, ça qu’il faut.

    C'est l'heure du café. Sans le regarder, ne pas attirer l'attention des autres elle essaye, fixant le bout de la table, manière d’enfant qui se cache les yeux en disant coucou, tu m'vois plus, sauf que là dit, suivez la flèche, pas mon arc, sait, jamais lui faire la leçon devant les autres, ça aussi l'énerve, pose sa main sur son bras, façon, calme-toi, c'est pas grave. Le tranquilliser, montrer qu’elle avec lui, soutien. Compte sur le geste, ça, mettre la main sur le bras, petite poussée des doigts, va comprendre, sûr, saisir lui, signal, n'est pas bête, finira par, l’allusion, l’implicite, dans cette caresse.

    Mais marche pas, réagit pas comme il faut, pire même s'énerve davantage, des pics dans la voix, des rauques ah, oh ; elle insiste, la voix grimpe, peut pas le regarder ni lui parler, l’air de rien, stratégie, petits coups répétés sur son poignet; aucun succès, alors dernière fois, tente la pression  du doigt, mais forte, une longue seconde sur la main se disant qu’enfin va marcher.

    Et, là, explose,

    - Mais arrête de me mettre la cafetière brûlante sur le bras, bon sang, ça me brûle.

    Tablée éclate d'un long fou rire, rebondit d'une hilare à l'autre, fait à nouveau le tour, et le tour et le tour aux larmes, à mesure chacun avise la cafetière, le bras et la déconfiture de Grand-Mère.

     


     

     


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