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    Curieux ce sentiment de permanence

    j’y reviens comme dans un appartement qu’on connaît déjà,

    peu d’enjeu, si ce n’est pourtant cette distance

    et comment ça fait le nuage pour l’essen-ciel,

    cloud ancré presque plus clair,

    câble transatlantique

     

    et pourtant ce n’est pas comme si j’y allais tous les ans,

    non, en Californie je n’y étais pas retournée

    depuis 1992 ou peut-être était-ce 1993,

    ou quelque chose comme ça.

     

    L’année d’Anchorage comme on dit l’année de la Méduse.

     

    Et ici le lien géant qui ne se rompt pas,

    Dont on éprouve la résistance à distance

    Du phatique, de l’étonnement toujours

    Comment nommer une évidence qui ne l’est pas

    Qui résiste au vent brutal ici quand on arrive

     

    Pas celui agitant les feuilles jaunes des sierras

    Non le vent puissant qui enlève qui déplace

    qui gifle les joues

    Bien de sa saison, on dit qu’en hiver le vent déménage,

    Débarrasse les débris en claquant les portes

     

    Elle est là l’évidence.

    De cette journée les couloirs vides de sens

    Les tarmacs jonchés d’allées d’indésir

    Les écrans de cabine, partout tous et encore des films

    Un luggage perdu,

    l’huile de conviction pour quand-même emporter ses objets

    Mais j’ai passé seize heures à dormir

    dans les bras des hublots, ding dans dong.

     

     

     

     



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    1

    Le Codeur. Je suis là, je vous suis.

    La Femme. Qui me suit ?

    Le Codeur. Vous m'avez déjà lu, je suis sur vos chemins.

    La Femme. Mais qui êtes-vous ?

    Le Codeur. Vous m'avez reconnu ?

    La Femme. Oui, je crois, mais ça ne me dit rien sur ce qui vous amène ici.

     

    2

    La Femme. C'est amusant, vos commentaires,

    je ne les comprends pas tous.

    Le Codeur : Eh, eh.

    La Femme. J'essaie de me faire une opinion sur vous,

    mais difficile.

    Le Codeur : Ne vous inquiétez pas, je suis là.

     

    Ces jours à croire qu'un jour.

     

    3

    La Femme. Je crois que j'ai vu tout de suite

    que vous me suiviez, dès le premier jour en fait.

    Le Codeur. Eh oui, j'ai l'oeil.

    La Femme. Mais quel oeil ? Vous ne me connaissez pas.

    Le Codeur : c'est à dire…

    La Femme. Dire quoi ? Vous me connaissez ?

    Le Codeur. …..

     

    4

    La Femme. Je ne comprends pas tout de ce que vous dites.

    C'est parfois mystérieux.

    Le Codeur : Qu'est-ce qui est mystérieux ?

    La Femme. Votre présence,

    il semble que vous communiquiez

    avec des gens du monde entier.

    Le Codeur. C'est pas faux.

    La Femme. Et moi je ne vois que des bribes,

    par ci par là, je ne sais rien de vous.

    Le Codeur : Vous êtes tout aussi obscure,

    vos fils d'Ariane que vous affichez

    et dont on ne sait où ils mènent.

    La Femme. Mes fils d'Ariane.

    Mais je suis transparente, je ne parle que la vérité, la voix claire.

    Le Codeur. La vérité, hein, la vérité ?

    La Femme. Mais oui, je tente de me dire

    au plus près de ce que je ressens.

    Le Codeur. Mais vous changez souvent de ressenti, semble-t-il ?

    La Femme. Oui, je joue avec ma mémoire, ma passoire,

    je ne fais pas l'effort de retrouver les faits, les précisions.

     

    Les sèmes, juste les sèmes, elle se fait l'impression d'un petit Poucet

    quand elle tente de retrouver le chemin.

     

    5

    Le Codeur. Tu parles de quoi, là ?

    La Femme. Vous tu me tutoies maintenant ?

    Le Codeur. Juste un soir, envie de m'amuser.

     

    Et puis un jour, cet homme la touche

    avec ses mots sur la page. Elle ne sait plus pour quoi.

     

     

    6

    Le Codeur. Moi ça me va bien la technique,

    d'ailleurs j'avais déjà vu des photos sur les formes du travail.

    La femme. Alors vous étiez déjà venu ?

    Le Codeur. N'avoue jamais, jamais, jamais….

    La Femme. Mais vous m'avez laissé des messages ?

    Le Codeur : ….

     

    L'homme vient en Américain et en technicien, il semble prendre d'assaut,

    parfois se met à rire ou en colère, ces petits sèmes qui font fleurir l'enfance.

    Et elle revient. Et puis les mots du texte, ses billets qu'elle lit.

     

    7

    La Femme. Mais vous aussi, vous avez de belles photos,

    j'ai aimé vos entrailles du métal et puis la forme des villes.

    Le Codeur. Mes strates, mes alluvions, ma cathédrale-poisson,

    une esthétique à coucher, de longtemps me ploie.

    La Femme. La mienne est venue peu à peu.

    Je ne sais dire quand j'ai appris à aimer le laid.

    Le Codeur. Non, le laid n'est pas laid.

    C'est le beau d'aujourd'hui.

    La Femme. Je crois que c'est le regard qui fait l'aujourd'hui,

    ce qui nous est donné, qu'on veut bien regarder.

    Le Codeur. Oui, même les lignes de code sont belles,

    les signes, les bouts de textes entremêlés.

    La Femme. Oui, étrange la lecture des lignes, cet entrelacs,

    on reconnait du discours et puis tout ce jargon autour,

    mais je n'y comprends rien. (Elle rit :-)).

    Le Codeur. Vous devriez. (triste mine :().

     

    8

    Le Codeur. Yeah ! ça swingue.

    La Femme. Vous aimez la musique.

    Le Codeur. Sans musique, comment écrire les lignes de code ?

    La Femme. Oui, toujours vos lignes, une sorte de partition,

    avec ses signes kabbalistiques.

    Le Codeur. N'y voyez rien d'obscur,

    ça ne l'est que parce que vous et les autres

    refusez de vous y intéresser.

    La Femme. C'est si sec, aride comme le désert.

    Le Codeur. Et pourtant, ça nourrit votre peau,

    les façades de vos rues, les lumières de vos vies.

    La Femme. Sans doute, sans doute.

    Mais j'aime le tamis, quand remonte à la surface

    la belle longueur des phrases.

     

    A force de lire ses mots, elle est entrée dans sa musique

    et a mis ses pieds dans les traces et elle ne s'en lasse pas.

     

    La ville est une timeline, on la partage et pourtant elle est à chacun en propre.

    Et les mots de l'homme du livre se sont habitués à se restreindre

    en tous petits messages, parfois à elle adressés,

    et parfois pas, des mots légers, presque par hasard.

     

    9

    Le Codeur. Si vous ne publiez pas, je vais partir.

    La Femme. Mais je ne suis pas prête.

    Le Codeur. Oui, mais c'est comme ça, je suis

    La Femme. Inconstant ?

    Le Codeur. Peut-être.

     

    10

    La Femme. Ne me mettez pas la pression,

    je suis blackboulée dans ce grand chambardement.

    Le Codeur. Faut vous y faire.

    La Femme. M'y faire ? Alors c'est ça le prix à payer ?

    Le Codeur………………….

    La Femme. Le monde est silencieux sans vous.

    Le Codeur. Et ?

    La Femme. Mais avec vous il est si multiple,

    il sème à tous vents et je ne sais

    Le Codeur. C'est simple, apprenez html, et tout le tralala.

    La Femme. J'ai appris html, et puis j'ai oublié,

    je pourrais réapprendre...

    Le Codeur. Voilà, on y vient, vous allez enfin comprendre.

    La Femme. Je peux apprendre vite,

    mais je n'ai pas l'ami là à côté.

    Le Codeur. Pas mon problème.

    La Femme. Oui, je sais, le mien.

     


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    Rêve

    verve vraie

    verte

    Verbe de nuit, nos conversations

    La liseuse de ramure, sais pas pourquoi

    Ce repositionnement des sèmes en photo

    Sur mon écran tu es présent.

     

     


     

     


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    Elle est rayonnement, elle grimpe dans les rideaux de lin épais

    se place sur la barre et nous contemple d’un œil narquois.

     

    De la race des parleuses.

     

    Se juche sur les bras des fauteuils

    quand nous conversons le soir

    sait s’imposer dans les confidences,

    un amusement.

     

    De la race des sociables.

     

    Apportée par un écrivain

    En 96, je crois,

    Noire, de la famille des chats alertes,

    Elle fugue parfois toujours revient,

    à deux doigts du retour de vacances,

    elle saute moqueuse dans la voiture.

     

    Un jour elle part

    juste un peu plus longtemps,

    revient au moment du déménagement,

    je la trouve alourdie, il me dit,

    mais tu ne vois pas qu’elle est enceinte,

    et dans le nouvel appartement

    a donné vie sous mon lit à trois petits,

    dont Mina (déjà parlé ici),

    a partagé son accouchement avec moi, épuisée,

    effondrée sur la couverture,

    une coureuse de fond

    à la fin du marathon.

    M’a laissé gérer le petit enclos aménagé dans la salle de bain,

    on a fait maternité au 95.

     

    D’un coup j’ai vu la capricieuse se faire

    la mère sacrifiant ses mamelles à la gent gourmande

    la mère éducatrice, cache tes excréments question de survie,

    la mère donnant ses leçons d’un coup de pattes vengeur

    ou houspillant, j’ai l’instinct là,

    comment c’est engrammé

    dans quel circuit, sur quels neurones,

    ce réflexe conditionné,

    sevrant à deux mois pile, that’all folks,

    et les petits de partir.

     

    Je l’aime pour sa liberté,

    pour ses rouspétades

    quand elle n’est pas contente,

    quand elle, si habile, renverse exprès ta tasse,

    marche sur le clavier,

    ou déboulonne la statuette sur le muret.

     

    Sa façon de venir me dire qu’un plat est cuit,

    Sa façon de m’informer que le téléphone sonne,

    Sa façon de me réveiller quand le réveil ne me réveille pas,

     

    Elle est mon petit contrôleur, ma conscience,

    Ma douceur angevine aussi,

    provoque mes éclats de rire.

    Je l’aime pour sa façon de s’installer à côté de l’ordinateur,

    ma première lectrice.

     

    Impavidité des yeux et pourtant,

    c’est sa chair, sa peau,

    quelque chose d’une intention pour moi que j’aime,

    subtilité et ferveur,

    rouerie et candeur,

    fait-on le portrait d’un autre, non

    elle est tout ça, vraiment, un être à part entière.

     

    Et quand elle se fait chienne

    courant derrière la porte quand le petit garçon sort

    se mettant à miauler de désespoir

    ou attrapant les boules d’aluminium qu’on jette en l’air

    elle sait aimer et le montre.

     

    Elle se fait câline à ses heures,

    se niche dans les bras, sous les bras.

     

    Jamais châtrée, je ne lui aurais jamais fait ce que,

    ainsi elle garde la mine gracile, la ligne sylphide,

    elle est celle sur qui le temps ne passe pas.

     

    Et puis un jour, c’est en septembre,

    elle traîne sa misère, ses ulcères,

    je fais maison de retraite at home,

    moi, son AVS spécialisée,

    je fais l’accompagnement à la mort

    je le sais que c’est fini depuis trois mois déjà

    nous le savons toutes les deux,

    elle me regarde, encore présente,

    si désolée de se laisser aller partout dans la maison,

    elle qui si fière a enseigné l’art de se bien tenir

    à ses chatons, je la vois qui s’abandonne.

     

    Hier soir comme je l'amène à son maître,

    je n’ose même pas la regarder,

    j’entends son miaulement si triste.


    Et aujourd’hui, en fin de journée,

    je reçois l’appel si triste d’un enfant

    qui a regardé sa souffrance en face

    et qui a dit seul comme un homme

    « Aidez-la à partir, maintenant ».

     

    Dream au paradis des chats, Next.

     

     



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  • Dites-le avec des fleurs

    crédit photo anthropia # blog

     

     

    Hier j’ai perdu ma bague, ne rien chercher de trouble, j’avais perdu ma bague, point. Ni bague de fiançailles, ni alliance, j’ai remisé tout ça il y a quelques temps déjà, non juste un anneau à deux cercles d’argent et entre eux des petits rubis, pratique ne s’use pas, on ne perd pas les pierres, bien serties entre les bras offerts, ma bague habituelle, je ne suis pas changeuse en matière de bijoux. A une certaine valeur, mais depuis longtemps, largement amortie.

    J’ouvre mon Encyclopédie favorite à la lettre B, qui me confie que le B est très compliqué.

    « Le B étant une consonne, il n’a de son qu’avec une voyelle ; ainsi quand le B termine un mot, tels que Achab, Job ou Jacob, après avoir formé le B par l’approche des deux lèvres l’une contre l’autre, on ouvre la bouche & on pousse autant d’air qu’il en faut pour faire entendre un e muet, & ce n’est qu’alors qu’on entend le B. Cet e muet est beaucoup plus foible que celui qu’on entend dans syllabe, Eusèbe, globe ».


    Ça commençait bien, en effet, sans la bouche, sans les lèvres, sans le e et sans ce coller soudain des lèvres l’une sur l’autre, c’est-à-dire une première ouverture pour aspirer puis le son mat des lèvres à bouche, point de B. Et le e muet qu’on n’entend pas et qui manquerait cruellement s’il n’était point là, est INDISPENSABLE. On ne peut s’en passer, je sais c’est redondant, mais.

     

    Chez les Grecs modernes, on ne dit plus, alpha, béta, on dit alpha vita, quel beau mot que ce B transformé en vit, on le voit tout de suite à la langue que ça vibre.

     

    Alors soyons précis, mes cours lointains de linguistique opératoire et de phonétique sonore me reviennent, non sans un coup de main de wi ki vous savez.

    « Voici les caractéristiques de la consonne occlusive bilabiale voisée :

    • Son mode d'articulation est occlusif, ce qui signifie qu'elle est produite en obstruant l’air du chenal vocal.
    • Son point d’articulation est bilabial, ce qui signifie qu'elle est articulée avec les deux lèvres.
    • Sa phonation est voisée, ce qui signifie que les cordes vocales vibrent lors de l’articulation.
    • C'est une consonne orale, ce qui signifie que l'air ne s’échappe que par la bouche.
    • C'est une consonne centrale, ce qui signifie qu’elle est produite en laissant l'air passer au-dessus du milieu de la langue, plutôt que par les côtés.
    • Son mécanisme de courant d'air est égressif pulmonaire, ce qui signifie qu'elle est articulée en poussant l'air par les poumons et à travers le chenal vocatoire, plutôt que par la glotte ou la bouche. »

    J’en reste bouche bée, cette précision de la consonne, cette mise à contribution de toutes les cordes, déployées jusqu’en leurs derniers retranchements, il s’agit d’obstruer le chenal vocal, et de voiser, c’est beau ce voisin qui fait vibrer l’articulation.

     

    Et cette oralité, à tous les sens du terme, au-dessus du milieu de la langue, plus que par les côtés, encore que ça puisse s’envisager, mais ici l’air et la bouche comme la geste qu’on sonne, ah, c’est central dans cette lettre.

     

    Et ce mécanisme de courant d’air égressif pulmonaire, tous les poumons à l’abordage, cette articulation au chenal vocatoire, chenons, chenons, jusqu’à répétition du B.e,, le bêlement de chèvre en récompense de ses bons et loyaux services de pousser l’air par les poumons de toutes ses forces, c’est bien le moindre effort qu’on puisse faire pour la bête.

     

    Mais où en étais-je, ah oui, à la BAGUE, chez Diderot et d’Alembert, pas de surprise, « petit ornement circulaire d’or, d’argent & quelques autres matières, qu’on porte à un doigt ». Pas très commun toutefois chez les Grecs, point chez Homère, nous disent les spécialistes, mais bien sûr chez les Egyptiens, Pharaon donnant par exemple sa bague à cacheter à Joseph. Les plus anciens Romains appelaient la leur ungulum, juste en passant.

    Mais c’est pour la frette des jeux d’anches de l’orgue à laquelle on donne le nom de bague, que j’ai une sympathie toute particulière.

    «  BAGUES ; on appelle ainsi, dans les jeux d'anches de l'Orgue, une frette ou un anneau de plomb D, (fig. 44. Pl. d'Orgue) soudé sur le corps du tuyau. Cette bague a un trou pour passer la rasette a b, au moyen de laquelle on accorde les jeux d'anches. Voyez TROMPETTE. Lorsque le tuyau est placé dans sa boîte A B, la bague doit porter sur la partie supérieure de cette boîte, dans laquelle elle entre en partie, & doit y être ajustée de façon que l'air contenu dans cette boîte, ne puisse trouver d'issue pour sortir que par l'anche du tuyau. Voyez ORGUE. « 

    Tout est dit, « ne puisse trouver d’issue pour sortir que par l’anche du tuyau ». Et ce TROMPETTE, on m'invite à naviguer, mais j'ai résisté dans l'attente, je ne suis pas allée non plus jusqu’à ORGUE, j’attends pour ça une occasion.

     

    Ah, tous ces paragraphes de bague et même jusqu’à BAGUENAUDIER, que je ne résiste pas au plaisir de citer

    « S. m. colutea (Hist. nat.) genre de plante à fleur papilionacée. Il sort du calice un pistil qui devient dans la suite une capsule membraneuse, enflée comme une vessie, dans laquelle il y a des semences qui ont la forme d'un rein. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)

    Son bois est clair, ses feuilles rondes, petites, d'un verd blanchâtre, avec des fleurs jaunes. Cet arbre se dépouille l'hyver, & se marcotte ordinairement, quoiqu'il donne de la graine. Sa graine étant mûre, devient jaune. (K) »

    Oui, tous ces paragraphes, on y succomberait, j'ai même jeté un coup d’œil à BAGUETTE, au doigt et à l’œil, que ne ferais-je pour nourrir l’animal, sans compter que j'y trouve mon intérêt :

     

    « S. f. On donne communément ce nom à un petit morceau de bois de quelques lignes d'épaisseur, plus ou moins long, rond & flexible. On employe la baguette à une infinité d'usages. Le bois dont on la fait, varie selon ses usages. On en fait même de fer forgé.

     

    J'en ai profité pour me cultiver, cette baguette divine ou divinatoire :

    « BAGUETTE DIVINE ou DIVINATOIRE. On donne ce beau nom à un rameau fourchu de coudrier, d'aune, de hêtre ou de pommier. Il n'est fait aucune mention de cette baguette dans les auteurs qui ont vécu avant l'onzieme siecle. Depuis le tems qu'elle est connue on lui a donné différens noms, comme caducée, verge d'Aaron, &c. Voici la maniere dont on prétend qu'on s'en doit servir. On tient d'une main l'extrémité d'une branche, sans la serrer beaucoup, ensorte que le dedans de la main regarde le ciel. On tient de l'autre main l'extrémité de l'autre branche, la tige commune étant parallele à l'horison, ou un peu plus élevée. L'on avance ainsi doucement vers l'endroit où l'on soupconnne qu'il y a de l'eau. Dès que l'on y est arrivé, la baguette tourne & s'incline vers la terre, comme une aiguille qu'on vient d'aimanter. »

     

    Finissant sur cette belle transpiration :

    « Une transpiration de corpuscules abondans, grossiers, sortis des mains & du corps, & poussés rapidement, peut rompre, écarter le volume, ou la colonne des vapeurs qui s'élevent de la source, ou tellement boucher les pores & les fibres de la baguette, qu'elle soit inaccessible aux vapeurs ; & sans l'action des vapeurs, la baguette ne dira rien : d'où il semble que l'épreuve de la baguette doit se faire sur-tout le matin, parce qu'alors la vapeur n'ayant point été enlevée, elle est plus abondante. C'est peut-être aussi pour cette raison que la baguette n'a pas le même effet dans toutes les mains, ni toûjours dans la même main. »

    on comprend mieux pourquoi j’y étais si sensible, point de vice là-dedans, juste de la vertu appliquée à la tâche.

    De la bague à la baguette, il n’y a vraiment qu’un pas, que j’ai parcouru ardemment dans la crainte de la perdre définitivement, j'aurais bien sûr aussi pu m'acheter cette petite fantaisie, mais pour ça on peut attendre, quoi que pour meubler ces longs silences d’objets qui font tant de peine, d’une certaine façon, je ne pouvais que la retrouver ma bague et ce matin, je l'ai retrouvée posée sur ce livre, qui fut le contrepoint l'automne et l'hiver dernier à ma lecture de Proust, tout un itinéraire pour me souvenir du chemin qui, elle était bien tombée de mon annulaire, je me suis dit que j’aurais dû prévoir la chose, perdre de la perte, tout un programme, c’était inévitable que cette bague à mon annulaire n’allait pas tenir, j’ai donc décidé de la mettre au majeur, bien au centre, deux doigts de chaque côté, comme emprisonnée dans cet embrassement, et là est arrimée, solidement emboîtée, elle ne risque plus de fuir.

    Elle est au doigt la bague.

     

    Débris de rien, de la bague à la baguette, rubis sur l'ongle


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