• Affiche du film

     

    Vicky Cristina Barcelona

    Woody Allen

     

    On lit de plus en plus de critiques négatives

    sur les films de Woody Allen,

    celui-ci est pour moi un bon cru,

    l'histoire, un homme, deux femmes,

    trois artistes, une bourgeoise,

    on le compte comme on veut,

    d'ailleurs à certains moments tout se brouille.

     

    Mais c'est aussi une narration,

    qui parle du trop-plein d'émotions quand il vous envahit,

    et l'art comme solution pour y faire face,

    créer c'est faire avec ses tripes, avec son angoisse,

    il traite de la rivalité des artistes entre eux,

    de la difficulté d'être ouvert, sans idées préconçues, sans jalousie, 

    d'aimer comme ça vient,

    c'est une grande leçon d'audace que ce film,

    qui montre aussi que la jeunesse

    est un des derniers territoires de la liberté,

    parce qu'elle autorise les vacances, cette jachère du temps,

    et ici la movida en Espagne, parce que sans doute aux USA,

    ce ne serait pas possible, ces sentiments hors conventions,

    cette conversation exempte des influences religieuses.

     

    Parce que c'est cela que nous montre le libre et libertin

    Woody Allen, une conversation légère et grave à la fois.

     

     

     

     

     

     


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  • Misses Freeze, 2002

    Fiorenza Menini

     

     

    Forcément on entre dans le film avec des préjugés.

    On a lu telle critique ici et on en attend beaucoup,

    du point de vue émotionnel ou filmique.

    On admire le superbe montage,

    cette succession de plans séquences

    qui font avancer le film d'un dialogue de classe à une réunion de profs.

    On aime les regards appuyés de François à cet autre prof,

    ces regards qui disent, je me couche,

    j'admets ton argument, je me tais.

    On aime même cette manière de filmer,

    juste assez près, mais pas en gros plan non plus.

    Bref le film est bon, se boit sans soif,

    et on en redemanderait.

    Pourtant, j'en ressors dans un état paradoxal,

    quel film gai et noir à la fois.

    Ce qui est pénible dans le film de Laurent Cantet,

    mais peut-être est-ce aussi présent

    dans le livre de François Bégaudeau,

    c'est qu'on y trouve tout, comme dans une auberge espagnole.

    On y dit à la fois l'énergie et la misère de ces jeunes,

    la gouaille et le handicap langagier,

    on a envie de se brancher sur eux,

    mais on comprend qu'ils ne savent pas eux-mêmes

    où ils vont et que ce serait dangereux.

    On y apprend que l'école vous enseigne des choses,

    mais qu'on n'y comprend rien.

    Que les profs sont benêts, mais finalement épatants.

    Le film ne se bat pas pour une théorie,

    il s'arrange pour plaire à tout le monde.

    Et c'est ça qui me dérange.

    Parce qu'il y a un angle mort dans cette fable,

    l'angle de la pédagogie :

    parlons un peu du contenu sous-jacent,

    bien sûr, on y voit un prof déployer les charmes de sa personnalité,

    ne rien céder de sa compétence langagière

    face aux barbares de l'empire mauresque,

    et même à un certain point, on pense qu'il est un adepte

    de ces nouvelles pédagogies, ne valorise-t-il pas Suleiman

    en punaisant ses photos au mur,

    lui conseillant d'écrire des légendes,

    façon de le ramener dans le groupe.

    On y croit, il va le sauver.

    Puis contre toutes attentes, et alors qu'il tente de défendre l'élève

    dans un conseil de classe remonté,

    il dérape et se soulage par un "Suleiman est limité".

    Phrase que seules les deux représentantes des élèves ont entendue,

    phrase qui ruine la confiance en soi d'un jeune,

    phrase qui désespère,

    comment lire autrement le passage à l'acte de l'élève.

    C'est ici que je refuse le film,

    dans cet abandon de ce qui constitue selon moi

    le principe même de l'école, ce qui l'a fondé

    sous la IIIème République, l'école pour tous,

    l'école qui permet de s'élever dans la société,

    l'école qui sauve de son milieu et de son ignorance.

    Une phrase vite oubliée,

    dont plus personne ne parle dans l'équipe pédagogique.

    Oublié Carl Rogers et sa pédagogie du succès,

    oublié ce savoir FONDAMENTAL du rôle du prof,

    ne pas juger l'être, mais critiquer ses actes.

    Dire à un élève comme Suleiman, qu'il est limité,

    c'est le renvoyer au bled,

    plus sûrement que n'importe quel père en colère,

    à l'état sauvage d'un hominidé qu'on renonce à humaniser.

    François est victime de son élitisme profondément ancré,

    son angle mort à lui, s'est-il reconnu dans ce mot vitriolé ?

    Car qui sinon lui est limité, aveu de faiblesse,

    c'est çui qui dit qui y est.

    Quand il rédige le rapport de ce qu'on appelle pudiquement "l'incident",

    il oublie les attendus de l'affaire.

    Et puis un prof lui a servi la soupe, un Ponce Pilate,

    "Suleiman nous a quitté depuis longtemps", c'est lui qui se désinvestit.

    Mais n'est-ce pas aux profs d'aller chercher ces élèves

    qui font de la figuration ?

    Entre les murs a cette perversion légère,

    qui fait que tout le monde apprécie,

    pour peu que tout le monde se fiche de la vérité,

    car au fond ce film est d'un cynisme absolu.

     

     

     

     

     

     

     

     


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  • Melvil Poupaud et Chiara Mastroianni

    Un conte de Noël

    film réalisé par Arnaud Desplechins

     

    Entrons dans l'univers complexe et talentueux d'Arnaud Desplechins.

    Comme cela se passe parfois dans la vraie vie,

    une mère, Junon, Catherine Deneuve, n'aime pas son fils,

    -elle le lui dit et lui de même-

    mais a besoin d'Henri pour une greffe de moelle,

    pour se sauver d'une leucémie prévisible.

    On ne sait de quel mythe s'inspire cette histoire ;

    dans quelle mythologie un fils met-il sa mère au monde ?

    Le film lui-même se pose la question.

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    Il y a Elisabeth, la fille aînée,

    qui ne se remet pas de la mort

    d'un frère né avant elle, Joseph,

    mort d'une leucémie faute de donneur familial compatible.

     

    Mais est-ce bien cela ?

    Elle a bien compris que le fils mal-aimé,

    celui engendré pour sauver son frère,

    et qui a failli, faute de compatibilité,

    a développé une forme de perversion,

    agir comme un Docteur Faustus

    qui aurait vendu son âme au diable,

    il sème le désordre, cherche à se venger.

     

    Elle l'empêche de ruiner ses parents

    et en échange demande à la famille

    De ne plus le recevoir en sa présence ;

    les parents le bannissent des fêtes de famille,

    Et cela aurait continué comme ça, si la mère n'était pas tombée malade.

    <o:p> </o:p>

    L'histoire en enfilade génère d'autres intrigues :

    le fils d'Elisabeth entre en schizophrénie,

    Lui aussi compatible et prêt à donner sa moelle.

    Un petit-fils donnerait-il la survie à sa grand-mère ?

    Le scénario oscille entre ces deux possibilités.

    <o:p> </o:p>

    Et puis il y a le fils plus jeune de Junon

    Qui a joué aux dés sa fiancée avec son frère et son cousin.

    Et cette jeune femme, qui découvre que quelque chose

    de son destin lui a échappé,

    très beau rôle de Chiara Mastroianni,

    peut-être le plus beau du film,

    parce qu'une parole juste semble naître,

    dans la relation à Simon, le cousin.

    <o:p> </o:p>

    Enfin, le père, dont le discours est à peine audible,

    Une voix qui en aurait deux,

    une voix caverneuse

    D'un repenti de la tabagie.

    Un authentique amant, musicien, artisan, lettré.

    Pas beau le père, mais aimable.

    <o:p> </o:p>

    Voilà, tout cela s'emmêle, j'ai oublié l'amie juive d'Henri,

    Qui fuit la folle famille et les Noëls chrétiens.

    Tout cela se mixte, se détruit, se dévoile,

    Les comptes se règlent ou pas,

    Dans un conte grimaçant.

    <o:p> </o:p>

    Mais plus le film avance, plus un soupçon s'insinue.

    Il résonne avec le passé d'Arnaud Desplechins.

    J'ai en tête le livre de Marianne Denicourt, ex-femme du réalisateur,

    Et qui ressemble curieusement à Elisabeth.

    J'ai en tête qu'elle lui reproche, à la suite de leur rupture,

    D'avoir raconté son histoire dans Rois et Reines,

    récit d'une femme qui a perdu son mari,

    dans une mort stupide, celui-ci enjambant de nuit la fenêtre de l'entrée,

    parce qu'il avait oublié ses clefs, et qui tombe de plusieurs étages.

    J'ai en tête que Desplechins a prétendu que c'était sa faute à elle,

    dans le film, elle refuse d'ouvrir la porte à son mari, d'où la chute.

    J'ai en tête une curieuse lettre que Desplechins envoie au fils,

    Pour lui raconter que sa mère a tué son père.

    J'ai aussi en tête qu'Eric Rochant, réalisateur d'Un monde sans pitié,

    a cassé la figure d'Arnaud Desplechins, qui lui a joué un sale tour,

    et qu'Hippolyte Girardot, mari d'Elisabeth dans le film,

    était aussi le héros du film de Rochant,

    qu'il casse la figure à Mathieu Amalric, figure desplechienne s'il en est,,

    qui vient de l'insulter en disant qu'il ne compte pas.

    <o:p> </o:p>

    Et à voir ce film, tout à coup,

    j'ai l'impression que le Docteur Faustus,

    n'est pas l'excellent Mathieu Amalric,

    mais bien le metteur en scène

    D'une fable glauque

    qui vient se superposer au conte.

    Elisabeth et son fils fou qui la menace d'un couteau,

    une affabulation qui se veut menaçante ?

    Piètre vie d'Elisabeth délaissée par son mari,

    qui pleure chez son psy et chez son père

    en se demandant pourquoi elle est toujours triste,

    le père répondant que c'est parce qu'elle s'est séparée de son frère,

    une phrase subiliminale, lancée par Desplechins à la tête de Marianne ?

    <o:p> </o:p>

    Tout cela ressemble à s'y méprendre à un règlement de compte

    A décoder, double langage, menace déguisée,

    Lettre mesquine envoyée par Henri à Elisabeth,

    Si peu crédible à ce stade de l'histoire,

    Ne serait-ce pas plutôt une lettre de Desplechins à Marianne ?,

    redonnée en cadeau de Noël par Elisabeth à Henri.

    <o:p> </o:p>

    Et je sors de la salle, mal à l'aise.

    <o:p> </o:p>

    Oui, tout est là pour une grande œuvre,

    Comme l'a dit Alain Finkelkraut,

    Qui y a dédié une de ses émissions, Répliques,

    Sur France Culture.

    Roubaix filmé comme dans un thriller américain,

    La bande son, un travail époustouflant,

    Chacun vivant dans son univers sonore,

    Avec quelques inserts d'adresses directes au spectateur,

    comme déjà vu chez Christophe Honoré,

    l'enchevêtrement narratif et le montage, de la belle ouvrage.

    <o:p> </o:p>

    Mais quelque chose dissone,

    le but, l'enjeu du film,

    semble se perdre en route.

    On n'apprend rien du don final,

    même pas que c'est un don.

     

    Et cela se sent, trouble la vue,

    fait qu'on y voit double,

    c'est l'esprit de menace qu'on retient,

    d'un homme contre une femme,

    qui se sert de l'art

    pour prendre une bien vaine revanche,

    nous utilisant, nous public, au passage.

    <o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p><o:p> </o:p>

     

     

     

     


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    "We have a situation", la phrase la plus citée dans le cinéma américain d'aujourd'hui. Le politiquement correct pour dire, "on a un problème". Tout est dans l'allusif, la litote. Une situation. Un contexte, un moment, un espace. Tout cela pour ne pas dire le mot "difficulté", qui rendrait fragile le dispositif, en indiquant qu'il a pu exister un moment où rien n'a été maîtrisé, où un caillou travaille dans la chaussure, où un élément non contrôlé vient bouleverser l'harmonieux arrangement du monde tel qu'il doit être.

     

    We have a situation, dans "La vengeance dans la peau", la situation s'appelle Jason Bourne et elle va envahir comme un virus toute la surface du film, jusqu'à subvertir l'ordre établi et régler une plus ancienne situation, qui s'appelle un programme de fabrication de tueurs.

     

     

    Dans le film "Michael Clayton", dont le réalisateur, Tony Gilroy, est le scénariste du précédent, la situation pèse sur les épaules de Georges Clooney. Il ne vit que de cela. Comme dit son patron, un avocat leader d'un grand cabinet américain, "c'est rare de se trouver une niche" et Michael Clayton a eu cette chance de devenir l'homme de ménage du groupe, de régler les petites situations qui empêchent que le capital fasse des petits, que les victimes le restent, que les riches puissent continuer à l'être (riches) impunément.

     

     

    Jeu sobre de Georges Clooney, homme lourd qui porte comme un fardeau les turpitudes de ses collègues, frères, clients et contemporains. Seul son fils lui apporte l'espoir qu'un jour cela pourrait changer.

     

    Et cela va changer. Quand il devra constater son manque de lucidité lors de la mort d'un ami, quand il va réaliser que certaines situations doivent être assumées et pas négociées, Michael Clayton va secouer les dix-sept ans d'hyperdisponibilité qui lui servent de vie et régler une fois pour toutes LE PROBLEME.

     

     

    Un salaud est un salaud et un pesticide mortel, un pesticide mortel. Quand à Georgie, je craque.

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Persepolis

    Film de Marjane Satrapi et de Vincent Paronnaud

    (Droits réservés)

     

    Persepolis

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    Une petite histoire toute simple, à la première personne du singulier.

    <o:p> </o:p>

    Un Bildungsroman, un roman d'éducation d'une jeune fille libre au pays des Ayatollahs, qui aiguise son regard caustique et son intelligence incisive, sans complexe.

    <o:p> </o:p>

    Elle a vécu, à l'âge où les enfants sucent leur pouce, les récits des geôles du Shah, à l'âge où les ados font leur crise, la révolution et la guerre, à l'âge où les jeunes filles vivent leur puberté à l'ombre de leur mère, la grande aventure de la vie seule à l'étranger. Mais pour autant, elle n'a pas oublié de vivre son enfance de petite fille vive, sa jeunesse d'ado rebelle et de jeune fille sexuellement libérée.

    <o:p> </o:p>

    Elle, qui voulait devenir prophète, semble tout vivre en double et, quittant son pays trop jeune, finit par défaire les liens ordinaires de l'attachement communautaire. Par la force des choses. Par l'éloignement.

    <o:p> </o:p>

    Elle s'y est reprise à deux fois pour partir. Avant de quitter l'Iran définitivement, elle vit dans sa chair l'oppression des femmes et commence à contester l'ambivalence des mollahs, qui usent et abusent des règles arbitraires ; ne pas montrer le corps, mais lorsque les filles portent de larges pantalons pour suivre la mode, alors ils conseillent les pantalons plus étroits ; ne pas céder à la tentation du sexe, mais ils laissent les garçons porter jeans moulants et formes suggestives. Comment aurait-elle pu trouver sa place dans ce non-lieu pour les femmes ?

     

    Ses parents l'ont préférée loin et sauvée que proche et menacée. Leçon d'amour, de protection. Inoubliable. En particulier celle de la grand-mère, femme forte, fumant la pipe, et pratiquant la galéjade comme la leçon politique avec la même tranquille assurance. Véritable modèle, dont on sent combien elle a inspiré sa petite fille, Marjane Satrapi, auteure de la bande dessinée « Persepolis » et co-auteure avec Vincent Paronnaud du dessin animé au titre éponyme, qui vient d'obtenir le Prix du Jury de Cannes. Bien mérité. 

     

     

     

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